2° dimanche du temps ordinaire, 3° lecture

Sur Jean 2, 1-11
L’eau fut changée en vin

Ephrem le Syrien
Commentaire du Diatessaron, SC 121, p. 213s

Au désert, notre Seigneur multiplia le pain, à Cana il changea l’eau en vin. Il habitua ainsi la bouche de ses disciples à son pain et à son vin, jusqu’au temps où il leur donnerait son corps et son sang. Il leur fit goûter un pain et un vin transitoire, pour attiser en eux le désir de son corps et de son sang vivifiants. Il leur donna libéralement ces menues choses, pour qu’ils sachent que son don suprême serait gratuit. Il les leur donna gratuitement, afin qu’ils sachent qu’on ne leur demanderait pas de payer une chose inestimable, car, s’ils pouvaient payer le prix du pain et du vin, ils ne pourraient payer son corps et son sang.
Non seulement il nous a comblés gratuitement de ses dons, mais encore il nous a cajolés avec tendresse. Car il nous a donné ces menues choses gratuitement pour nous attirer, afin que nous approchions et recevions gratuitement cette chose si grande qu’est l’Eucharistie. Ces menus morceaux de pains et de vin qu’il a donnés étaient doux à la bouche, mais le don de son corps et de son sang est utile à l’esprit. Il a caché de la douceur dans le vin qu’il a fait pour indiquer aux convives quel trésor magnifique est caché dans son sang vivifiant.
Comme premier signe, il fit un vin réjouissant pour les convives, afin de manifester que son sang réjouirait toutes les nations. Le vin intervient dans toutes les joies imaginables, et de même toutes les délivrances se rattachent au mystère de son sang. Il donna aux convives un vin excellent qui transforma leur esprit, pour leur faire savoir que la doctrine dont il les abreuverait transformerait leur cœur. Ce qui n’était d’abord que de l’eau fut changé en vin dans les amphores ; c’était le symbole du premier commandement amené à la perfection ; l’eau transformée, c’était la loi perfectionnée. Les convives buvaient ce qui avait été de l’eau, mais sans goûter l’eau. De même lorsque nous entendons les anciens commandements, nous les goûtons dans leur saveur nouvelle. Au précepte gifle pour gifle qui est dans la loi de Moïse, a été substitué la perfection : A celui qui frappe, présente l’autre joue (Matthieu 5,39).
En un clin d’œil, le Seigneur a multiplié un peu de pain et transformé l’eau en vin. Ce que les hommes font et transforment en dix mois de travail, ses dix doigts l’ont fait en un instant. Ses mains furent comme une terre sous son fruit ; le murmure de ses lèvres se répandit sur lui comme la rosée et le souffle de sa bouche comme le soleil ; en un très court instant il a mené à bout ce qui demande normalement une longue période. Le Seigneur a ainsi démontré la vigueur pénétrante de sa parole à ceux qui l’exécutaient, et la rapidité avec laquelle il octroyait ses dons à ceux qui en bénéficiaient.