Jeudi de la 1ere semaine du temps ordinaire

Sur Genèse 4, 1-24
Le sang versé du Juste crie de la terre
Sévérien de Gabala
Homélie sur les sacrifices de Caïn et les offrandes d’Abel

Nous rencontrons aujourd’hui dans notre lecture l’histoire de Caïn et Abel. L’un et l’autre avaient l’air d’honorer Dieu par un culte identique, mais, en fait, ils présentaient leurs offrandes avec des dispositions bien différentes. Celles de l’aîné n’avaient que l’apparence d’un don, celles du plus jeune, au contraire, témoignaient de sa révérence et de sa piété.
De là, naquirent des sentiments d’envie, car la piété, qui attend sa récompense du Juge suprême, s’attire toujours la jalousie des méchants. Abel fut donc assassiné : il fut le premier à confesser la justice, le premier à vénérer la piété, le premier à honorer la fidélité, à adorer Dieu en vérité.
Je trouve ainsi en saint Abel l’image du Christ. Le Sauveur, certes, est le Juste par excellence, le Prince de ces justes qui ont reçu la nouvelle naissance quand eut pris fin le règne de la loi. Mais parmi tous les hommes de l’ancienne Alliance, le prince de la justice, c’est Abel. Dans l’ordre de la régénération de la nature humaine accomplie par le Seigneur de tous, tu rencontres en premier le corps du Seigneur ; de même dans l’économie ancienne, comme prémices de la justice, tu trouves Abel. Oui, il est vraiment le prince des justes de l’Ancien Testament, comme le Christ est le Prince des justes du Nouveau.
Chose admirable : parce qu’il a combattu le premier pour la justice, Abel eut l’honneur de souffrir le premier pour la piété ! Il est vraiment la figure du Christ qui fut mis à mort à cause de la vérité. Le sang d’Abel annonçait le sang du Christ. Il criait de la terre ; le sang du Seigneur crie lui aussi. Mais le sang d’Abel était supplication, le sang du Christ est la réconciliation du monde. C’est pourquoi l’Apôtre, faisant mémoire de l’un et de l‘autre, confesse la supériorité du sang du Christ : Nous nous sommes approchés du Dieu vivant, le Juge universel, des âmes des justes arrivés à la perfection et d’un sang purificateur qui parle plus fort que celui d’Abel (Hébreux 12,22-24).
Oui, ce sang parle, il supplie pour les pécheurs, il intercède pour le monde. Le sang du Christ, c’est vraiment la purification du monde ; le sang du Christ, c’est la rédemption des hommes !