Sur Exode 40, 16-38
Dieu est présent au milieu de son peuple dans le désert
Saint Eucher
Eloge du désert, n° 3… 16

Ne peut-on raisonnablement avancer que le désert est le temple sans borne de notre Dieu ? Car celui qui habite dans le silence doit certainement se plaire dans les lieux retirés. C’est là que souvent Dieu s’est manifesté à ses saints ; c’est à la faveur de la solitude qu’il a daigné rencontrer les hommes. C’est dans le désert que Moïse, la face inondée de lumière, voit Dieu.
Là, Moïse est admis, pour la première fois, à converser familièrement avec le Seigneur ; il échange parole contre parole ; il demande et apprend tout ensemble ce qu’il faut dire et ce qu’il faut faire ; il s’entretient avec le Maître du ciel, ainsi que l’homme a coutume de s’entretenir avec son semblable. Là, il reçoit le bâton puissant en prodiges, et, après être venu au désert en pasteur de brebis, il quitte le désert en pasteur de peuples.
De la même manière, le peuple de Dieu, quand il doit être libéré d’Egypte et délivré des œuvres terrestres, ne gagne-t-il pas des lieux écartés, ne se réfugie-t-il pas dans les solitudes ? Oui, c’est dans le désert qu’il va approcher ce Dieu qui l’a arraché à la servitude. Il avançait donc dans ces vastes et terribles étendues sous la conduite de Moïse. Et le Seigneur se faisait le chef de son peuple en guidant ses pas à travers le désert. Sur la route, de jour et de nuit, il déployait une colonne, flamme ardente ou nuée rayonnante, signe venu du ciel. Israël suivait donc le rayon de lumière intense, étincelant de loin comme un feu scintillant que Dieu offrait, pour leur montrer le chemin, à ceux qui s’enfonçaient dans les profondeurs du désert.
N’est-ce pas aussi quand ils habitaient le désert que les Hébreux reçurent la Loi et les commandements divins, et méritèrent de contempler de près les caractères que le doigt de Dieu avait imprimés sur les tables ? Les enfants d’Israël obtinrent donc de voir le trône de Dieu et d’entendre sa voix, tandis qu’ils vivaient dans les solitudes du désert.
Faut-il ajouter qu’ils ne parvinrent à la Terre de leurs désirs qu’après avoir séjourné dans le désert ? Pour que le peuple entrât un jour en possession d’une contrée où coulent le lait et le miel, il lui fallut d’abord passer par des lieux arides et incultes. C’est toujours dans des campements au désert que l’on s’achemine vers la véritable patrie. Qu’il habite une terre inhabitable, celui qui veut voir les biens du Seigneur dans la terre des vivants ! Qu’il soit l’hôte du désert, celui qui veut devenir le citoyen des cieux !