Actes 27, 1-20

La crainte du Seigneur, don de l’Esprit-Saint

Saint Bernard

Sermon sur les sept dons du Saint-Esprit, OC 7, p. 97s

           La première grâce de l’Esprit-Saint est la crainte du Seigneur. Qui la possède déteste toute iniquité, selon cette parole du psalmiste : J’ai eu leur péché en horreur et je l’ai exécré. Car il est écrit dans les Proverbes : La crainte du Seigneur hait le mal. Job est appelé un homme craignant Dieu et s’éloignant du mal. Sans cette grâce, la première des grâces et le principe de toute la religion, aucun bien ne peut se produire ou se développer. De même, en effet, que la sécurité ou la paresse sont la cause et la source de tous les manquements, de même la crainte du Seigneur est la racine et la gardienne de tous les biens. Aussi l’Ecriture dit-elle : Si vous ne vous maintenez constamment dans la crainte du Seigneur, votre maison sera promptement renversée. Tout l’édifice des vertus, s’il vient à perdre le soutien de ce don, tombe de suite en ruine. Aussi Salomon s’écrie-t-il : Vivez chaque jour dans la crainte du Seigneur, parce que vous aurez l’espérance au dernier jour et votre attente ne sera pas enlevée. De là, vient que l’apôtre s’écrie : Opérez votre salut avec crainte et tremblement. Pourquoi multiplier les citations ? Religion et crainte sont choses corrélatives, et l’une ne peut demeurer sans l’autre. Ainsi dans les Actes des Apôtres, il est dit de Corneille qu’il était un homme religieux et craignant Dieu, et, de Siméon, Luc nous dit dans son évangile qu’il était juste et pieux. Aussi Salomon donne cette leçon : Craignez le Seigneur et gardez ses commandements.

          Nous devons avoir en nous ce sentiment de la même manière dont le bienheureux Job assure qu’il l’éprouve : Il craignit toujours Dieu comme des flots qui se précipitent sur lui. Sous l’empire de cette crainte de Dieu, nous abandonnons tout, nous renonçons au monde, et, ainsi que le Seigneur l’a dit, nous nous séparons même de nous : Si quelqu’un veut venir à ma suite, qu’il se renonce lui-même. Cette crainte divine rend, soumis à la pauvreté, celui qu’elle pénètre parfaitement, et elle l’éloigne du mal. Elle est au premier rang parmi les grâces comme la pauvreté dans la série des Béatitudes : c’est de cette pauvreté que le Seigneur a dit, en la plaçant comme le fondement des autres vertus : Heureux les pauvres, le Royaume des cieux leur appartient.