Matthieu 22, 34-40

Le plus grand commandement

Saint Hilaire de Poitiers

Sur Matthieu, tome 2, SC 258, p. 159s

 

Aux Saducéens qui le mettaient à l’épreuve succèdent les Pharisiens. Les premiers du moins avaient reçu une réponse satisfaisante au sujet de la Résurrection pour se convaincre que la Loi même d’où ils étaient partis contenait la foi dans l’espérance de la Résurrection. Les Pharisiens eux se glorifiaient d’avoir la science de la Loi qui, en anticipant l’avenir, contenait l’image de la vérité qui viendrait ensuite. Or ils demandent quel est le commandement privilégié dans la Loi, sans voir que le projet de la Loi a été accompli dans le Christ. Et, d’ailleurs, à l’arrogance de ces arrogants, il a été répondu par les mots mêmes de la Loi, et cette réponse a embrassé en elle tout l’enseignement de la vérité, car c’est la mission propre à notre Seigneur Jésus-Christ d’apporter la connaissance de Dieu. C’est comme envoyé qu’il était venu et, procédant de l’éternité, il accomplissait les volontés de Dieu. Aussi leur répondit-il que le premier commandement était : Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit. Il ne réalisait pas autre chose que ce que la Loi contenait, parce que les commandements de la Loi offraient en eux l’image de ce qu’il allait lui-même accomplir. Il leur rappelle donc une notion qu’ils se glorifiaient de posséder dans la Loi, l’obligation d’aimer Dieu tout-puissant de toute l’affection de son esprit, de son cœur, de son âme, en sorte que son rappel trouvait une confirmation dans les prescriptions de la Loi données au préalable.

Ensuite, il ajouta : C’est là le grand et le premier commandement. Le suivant lui est semblable : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Mais « commandement suivant et semblable » veut dire que, dans les deux cas, le devoir et le mérite sont les mêmes. Car l’amour de Dieu ne peut être efficace sans le Christ, ni l’amour du Christ sans Dieu. L’un sans l’autre n’est d’aucun profit pour notre salut. Et si dans ces deux commandements tiennent toute la Loi et les prophètes, c’est parce que la Loi et la prophétie tout entières étaient portées au compte de l’avènement du Christ, et que, leur donnant leur pleine mesure, son avènement procurait l‘intelligence de la connaissance de Dieu. Car, au sujet du prochain, nous avons souvent fait remarquer qu’il ne fallait l’entendre de nul autre que du Christ. Puisque nous sommes empêchés de préférer, un père, une mère, des fils à l’amour de Dieu, comment y a-t-il similitude entre le commandement de l’amour du prochain et celui de l’amour de Dieu, si la similitude du commandement n’exigeait pas l’égalité de l’amour égal pour le Père et pour le Fils ?