Matthieu 16, 13-19

« Tu es Pierre… »

Isabelle Graesslé

Prier 7 jours avec la Bible, L’Evangile de Matthieu, p. 107s

 

A nouveau, les pharisiens, alliés cette fois aux sadducéens, demandent un signe qui vienne du ciel. Le Seigneur leur répond qu’en fait de signe, il ne leur en sera pas donné d’autre que le signe de Jonas.

A nouveau, Jésus les renvoie au signe de Jonas : Jésus refuse d’entrer dans une demande primaire qui consisterait à faire apparaître, comme par merveille, une preuve visuelle.       Les signes sont déjà là, visibles, à portée de la frange du vêtement. Pour plagier Jésus, « que celui qui a des yeux pour voir, voie ! »

La question que tout ce jour a préparée retentit  enfin : Et vous, que dites-vous que je suis ? Précédée de peu d’une demande quant à l’opinion publique : Qui est le Fils d’humanité selon la rumeur ? Le catalogue des réponses s’ouvre, aussi vaste que la tribu des prophètes du Très-Haut. Mais ce qui importe, au fond, c’est ce que chaque disciple va répondre. Et vous ? Pierre, le rescapé des marches balbutiantes, s’avance : Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant.

Voilà. Jusqu’alors, nous avions entendu la voix claire du Père dans les cieux reconnaissant Jésus comme son Fils bien-aimé, au bord des eaux du baptême, et bientôt sur la montagne de la Transfiguration. Mais après le pain partagé, et la marche sur l’eau, l’un des grands tournants de l’Evangile, Pierre a vu les signes des temps. Il a reconnu le Fils du Dieu vivant, le Christ, l’envoyé, le Messie. L’attente si longue est achevée. L’accomplissement des Ecritures est parvenu à son terme, naissance d’un monde renouvelé.

Heureux est-il, ce Pierre en marche vers un bonheur pourtant si fugace, puisque à peine quelques lignes plus loin, Jésus le traitera de Satan ! Heureux est-il, ce Pierre reconnu en sa filiation spirituelle, celle de Jonas, comme lui à bout de souffle, puis annonceur des paroles de Dieu ; heureux est-il, ce Pierre, devenu socle d’Eglise, détenteur des clefs du Royaume des cieux, les clefs pour comprendre les signes des temps ; heureux est-il, ce Pierre sur lequel va se bâtir la communauté. Il instaure une lignée de marcheurs, oscillant entre crainte et témérité, entre inquiétude et foi. Car, on peut aussi le comprendre, c’est sur une telle roche, sur un tel matériau que Jésus bâtira son Eglise.