Ephésiens 5,21-6,4  ou  Jean 3,1-2+21-24

« Homme et femme, il le fit »

Suzanne van Der Mersch

Homme et femme, Famille, terre d’espérance, Christus n° 246 HS, p. 23s

 

Notre époque découvre la nécessité du face à face de l’homme et de la femme et s’y livre dans une grande diversité d’applications, à des niveaux de valeur extrêmement différents, de la spiritualité conjugale à toutes les expériences sexuelles que certains croient indispensables à leur équilibre.

Cette vision nouvelle de la relation homme-femme, transposée sur le plan de la foi, nous ramène à l’Ancien Testament. Heureux retour d’ailleurs, non une régression mais un progrès, car il assainit un climat pollué par les tabous, et libère la croissance de l’humanité entravée par la minorisation de la femme. Les excès et la médiocrité de bien des relations ne sauraient cacher la valeur de ce qui se cherche.

Pour le peuple de la Bible, c’est dans sa dualité même que l’être humain est à l’image de Dieu. C’est bien là ce que nous dit la Genèse dans son étonnant diptyque d’un symbolisme jamais épuisé. Le premier récit de la création, sobre, net, pose le fondement infrangible : Alors Dieu créa l’être humain ; à son image le créa ; homme et femme, il le fit. Le second récit, plus imagé, moins intellectuel, nous fait percevoir l’angoissante solitude de l’homme, emprisonné dans sa supériorité même sur tout ce qui l’entoure. Et c’est dans un cri d’émerveillement qu’il reconnaît celle qui est à la fois lui-même, l’os de mes os, la chair de ma chair, et l’autre, son vis-à-vis, celle qui, seule, est capable de le sortir de son isolement, de le révéler à lui-même, de l’empêcher de succomber à la tentation narcissique.

Aussi, pour le peuple hébreu, entrer dans la connaissance de Dieu, qui est avant tout le Dieu de l’Alliance, cela passe nécessairement par l’expérience de l’amour humain.

La rencontre de Dieu dans le conjoint serait-elle chose acquise ? Certainement non. C’est peut-être à la mesure de la difficulté de sa réussite qu’un véritable amour entre un homme et une femme parle de Dieu.

La pulsion de l’instinct sexuel est si puissante, si inquiétante, qu’on l’a longtemps cataloguée comme le péché. Or, dans la Genèse, il n’est pas question de cela. Le péché n’est pas dans la relation sexuelle : le péché est d’abord dans le désir d’être Dieu, de se suffire à deux. Dieu éliminé, aussitôt le dialogue se dégrade, le regard se trouble, Ils virent qu’ils étaient nus, et les cœurs se durcissent, accusent : C’est la femme qui m’a donné le fruit. Au respect de l’autre succède le désir de possession, d’assouvissement égoïste, détérioration de l’amour, pette de la liberté. C’est là une présentation simple, non simpliste, très profonde du drame humain.