Jean 1, 1-18

Soyez émerveillés en célébrant Noël

Saint Aelred de Rievaulx

Sermon pour l’année, sermon 48, Pain de Cîteaux 23, p. 34s

 

Jésus veut dire Sauveur. Sauveur : c’est exactement cela, puisqu’il sauve son peuple de ses péchés. Et pourquoi fait-il cela ? L’aurions-nous mérité ? Absolument pas. Pourquoi alors ? Parce qu’il est Christ, c’est-à-dire oint. Comment est-il oint ? Comme il l’a dit lui-même : L’Esprit du Seigneur est sur moi parce qu’il m’a oint. Cette onction est celle de la charité dont l’Apôtre dit : A cause de l’immense charité dont Dieu le Père nous a aimés, il a envoyé son Fils. Et lui-même dit dans l’Evangile : Il n’est pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis. Qui est celui-là ? Le Fils de Dieu. Oh ! Abîme d’humilité ! Le Fils de Dieu, revêtu de majesté, de puissance, de sublimité ! Le Fils de Dieu ! Lui qui était au commencement, lui qui était auprès de Dieu, lui qui était Dieu, voilà qu’il se fait chair et qu’il naît à Bethléem. Oh ! Abîme de bonté ! Lève-toi donc, ô Jérusalem, lève-toi par la ferveur, monte par le désir, vois par l’élan d’amour, tiens-toi sur la hauteur. Qu’as-tu à te tenir dans les bas-fonds ? Tout est transitoire, tout est passager, il n’y a rien de permanent, rien de durable. Quel intérêt a l’homme à tout ce temps passé sur terre, quel intérêt a-t-il ? C’est à peine un instant. Passe donc plus haut. Vole par-dessus le soleil, la lune et les étoiles qui sont dans le temps, et par qui rien ne passe plus vite, afin qu’après avoir dépassé les réalités temporelles, tu te tiennes dans la contemplation de l’éternité. Là, vois la joie qui vient à toi.

            Puissiez-vous, frères, imaginer dans vos cœurs ce qu’a été la nativité du Seigneur. Songeons à cette nuit en laquelle il est né, célébrons les vigiles nocturnes comme si nous étions près de sa crèche, embrassons avec une infinie affection la douceur de son enfance. Ayons de la ferveur dans la voix, de la sérénité dans le cœur, de la lumière dans l’esprit, de l’amour dans le désir. Voyons ainsi la joie qui vient à nous grâce à la naissance du Christ. Car Celui qui est né corporellement de la Vierge Marie naîtra spirituellement en notre âme, si elle est vierge. La virginité de l’âme, c’est l’intégrité de la foi, la limpidité de la dilection, la pureté du cœur. Dans une telle âme, le Christ est conçu par l’élan  intérieur, il se développe par le désir, il naît par l’expérience de la douceur divine. Puisqu’en nous tous la foi est intègre, faisons également en sorte que la charité soit sincère. Si quelqu’un a quelque chose contre un autre ou que cet autre a quelque chose contre lui, pardonnez-vous mutuellement comme le Christ nous a pardonnés. Malheur à celui qui, par l’amertume de son cœur, repousserait aujourd’hui le Christ loin de lui ! En outre, si le cœur a été souillé, qu’il soit lavé par une confession franche, afin qu’un lieu pur et chaste soit préparé pour le Fils de la Vierge, et que, durant cette nuit, Jésus Christ notre Seigneur fasse sentir sa présence en nos cœurs en y infusant sa douceur.