Luc 2, 16-21

L’humble consentement de Marie à l’œuvre créatricePaul VIpourquoi

Père André Feuillet

Marie et la nouvelle créature, VS 81, 1949, p. 474

 

Avec raison, les Pères n’ont pas manqué d’opposer à la désobéissance orgueilleuse d’Eve l’obéissance si humble de Marie : Voici la servante du Seigneur, qu’il me soit fait selon ta parole. Mais ce fiat de Marie est, en un certain sens, un fiat créateur, qui fait songer au fiat lux de la Genèse ; on croit en effet généralement que c’est à l’instant même où il est prononcé que s’opère le mystère. Fiat lux : Dieu est seul à agir lors de la création de l’univers. Fiat mihi : pour la recréation du monde. Dieu fait appel à notre concours, qui doit être d’abord humble consentement à une grâce et à un amour prévenants, et cette participation humaine, c’est en premier et avant tout le oui de Notre Dame. Certes, ce serait une grave erreur que d’attribuer à la parole de Marie, prise en elle-même, la vertu créatrice de la Parole divine. Mais de même que, dans le plan divin, l’homme sortant des mains du Créateur devait être roi de l’univers, de même, et d’une façon beaucoup plus éminente, la soumission totale de Marie la constitue pour toujours la collaboratrice de la Puissance divine, la toute-puissance suppliante et la Reine du monde nouveau.

Plus tard, à Cana et au Calvaire, elle sera associée de manière tout à fait analogue à l’inauguration et à l’établissement définitif de la nouvelle Alliance. Aux noces de Cana, symbole de ce mariage spirituel que sera la nouvelle Alliance et prélude du mariage définitif célébré sur le Calvaire, Jésus, qui appelle sa Mère femme, peut-être par allusion à Eve, la première mère de tous les vivants, affirme lui-même en termes exprès son union indissoluble avec la Vierge sainte dans l’accomplissement de son œuvre rédemptrice : Qu’est-ce que cela pour toi et pour moi, femme ? Mon heure n’est pas encore venue. C’est-à-dire, selon une explication qui nous paraît la plus heureuse : Que peu nous coûte, à moi et à toi, de donner du vin pour ces noces-là ; quand mon Heure sera venue, c’est le vin de mon sang qu’il nous faudra donner, moi et toi. Et effectivement, à l’heure suprême, Marie et Jésus se retrouvent au rendez-vous du Calvaire.