Marc 16, 15-18

Sur le chemin de Damas…

Saint Jean Chrysostome

Homélie sur le changement de noms, OC 5, homélie 1,4 + 3, 4-5, p. 169s

 

          Si Paul avait voulu plaire aux hommes, il  n’aurait pas choisi d’embrasser la foi. Pourquoi  l’aurait-il fait ? Il avait l’estime des Juifs, et se voyait accorder les premières places ; il n’aurait donc pas abandonné cette existence pour la vie périlleuse des apôtres, continuellement en butte au mépris et pleine de malheurs. Aussi, sous l’effet d’un changement et d’une transformation radicale, abandonner l’estime des Juifs et une vie exempte de dangers pour l’échanger contre l’existence des apôtres faite de mille morts, est-elle la plus grande preuve que Paul n’a pas choisi d’embrasser la foi en raison de calculs humains. Voilà pourquoi nous avons voulu vous montrer le zèle dont il était enflammé contre l’Eglise, afin qu’à la vue de l’ardeur intense qu’il déploie en faveur de cette Eglise, vous admiriez ce Dieu qui crée et transforme toutes choses.

            A ce point, quelques personnes se dresseront contre nous pour dire : Qu’y a-t-il de plus surprenant à la reddition de Paul ? Avec cette voix, c’est presque comme si Dieu lui avait passé au cou une corde pour l’attirer ensuite à Lui ! Il nous faut répondre ici aux Grecs et aux Juifs qui s’imaginent excuser leur incrédulité en s’en prenant au juste, sans savoir qu’ils commettent une double faute, pour ne pas abandonner leur erreur et pour s’employer à discréditer le saint de Dieu par de telles accusations. Et bien ! Nous, avec la grâce de Dieu, nous allons présenter sa défense. Quelle est donc l’accusation ? Dieu l’a attiré à lui par contrainte, dit-on. – De quelle contrainte veux-tu parler ? – Il l’a appelé d’en-haut ! – Crois-tu absolument qu’il l‘a appelé d’en-haut ? Alors dans ce cas, il t’appelle, toi aussi, aujourd’hui en usant de cette même voix, mais tu n’obéis pas. Vois-tu qu’il n’y avait nulle contrainte ? S’il y avait contrainte, il te faudrait, toi aussi, obéir ; mais toi, obéis-tu ?

            Pour quelle raison n’est-ce pas la voix qui se fit entendre en premier lieu, mais est-ce d’abord la lumière qui l’enveloppa ? Pour qu’il écouta calmement la voix. Un homme tout entier appliqué à une occupation et rempli de fureur, des centaines d’hommes pourraient bien l‘appeler, il ne se retournera pas, absorbé qu’il sera tout entier par le sujet qui l’occupe ; on pouvait craindre que cela ne se produisit aussi dans le cas de Paul et que, enivré par la folie des événements passés, il ne prêtât aucune attention à la voix, ou n’en écoutât même pas les premiers mots, ayant l’esprit tout entier occupé par les arrestations qu’il projetait. Aussi, le Seigneur commença-t-il par frapper ses yeux de cécité grâce à la lumière, par apaiser sa fureur, par calmer tout le trouble de son âme, et ramener un grand calme dans son esprit, avant de faire entendre la voix, cela pour lui permettre, une fois sa présomption abattue, de prêter ensuite humblement attention à ses paroles.