Romains 1, 17-32

« Ce que l’on peut connaître de Dieu… »

Saint Hilaire de Poitiers

De la Trinité, XII, 53, SC 462, p. 461s

 

Dans tout le cadre de la vie humaine, ô Dieu, tu as mis à notre disposition une foule de choses dont la cause peut rester ignorée, mais dont l’effet, du moins, est connu. Et même si la connaissance naturelle manque, la foi religieuse est là. Car si je lève vers le ciel les yeux infirmes que sont la lumière de mon corps, j’ai la foi que ce ciel est Ton ciel, et rien d’autre. Quand le regarde les jeux des étoiles, leurs cercles, leur cours annuel, les constellations qui ont reçu chacun le programme de leur office variés, je Te lis, Toi, Dieu, en ces êtres dont je n’ai pas l’intelligence. Quand je vois les admirables soulèvements de la mer, tout incapable que je suis de scruter, non seulement la naissance des eaux, mais le mouvement de cet échange équilibré, je saisis cependant la foi de cette raison des choses qui m’est impénétrable ; et dans ces choses que j’ignore, je ne T’ignore pas. Si, après cela, je me tourne en esprit vers les terres qui, en vertu de causes cachées, dissolvent les semences qu’elles reçoivent, les vivifient une fois décomposées, les multiplient une fois vivifiées, les fortifient une fois multipliées, je ne trouve là rien que puisse comprendre mon intelligence : mais mon ignorance m’amène à Te saisir, Toi. Borné devant la nature qui me sert, le Te saisis, Toi seul, en usant de ce qui m’est utile.

Et moi, m’ignorant moi-même, je sens que plus je m’ignore, plus je dois T’admirer : car le mouvement, ou la raison, ou la vie, de mon esprit qui juge, je les sens, mais je ne les comprends pas. Et parce que je les sens, je me reconnais ton débiteur, parce que Tu me donnes de percevoir la beauté sans passer par la connaissance des causes naturelles. Et puisque, ignorant ce qui me concerne, je Te saisis, Toi, et Te saisissant, je Te vénère, je ne laisserai pas faiblir ma foi en Ta toute-puissance révélée par Tes œuvres, sous prétexte que je ne sais pas. Mais que toute ma possibilité de connaître s’occupe de chercher ton Fils unique : de tout ce qui est en moi qu’elle se fasse un échelon pour tendre au-delà, vers mon Créateur et mon Dieu.