Matthieu 16, 13-19

Pierre reconnaît en Jésus le Fils de Dieu

Dom Mauro-Guiseppe Lepori

Simon appelé Pierre, p. 57s

 

          Un jour, dans la région de Césarée de Philippe, Jésus surprit ses disciples par une drôle de question : Qui suis-je au dire des gens ?

          Ils répondirent que, pour certains, il était le Baptiste, pour d’autres Elie, ou Jérémie, ou un autre prophète. Cette question, à vrai dire, les mit dans l’embarras. Du moment qu’ils se préoccupaient beaucoup de ce que les gens pensaient de leur Maître, ils pouvaient craindre que Jésus les accuse de trop dépendre de l’opinion publique.

          Jésus écoutait, impassible, les noms que les disciples lui communiquaient. Le silence qui suivit les fit penser que l’argument ne donnerait pas lieu à des développements. Mais de façon imprévisible, le Maître s’arrêta, se tourna et les regarda. Il pouvait les fixer tous à la fois et chacun individuellement.

          Et vous, que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je ?, leur dit-il.

          Chacun se mit à réfléchir : mais leur réponse se brisait à chaque fois dans le doux regard du Seigneur.

          Leur incapacité à répondre les fit vaciller. Comment donc ? Ils avaient tout laissé pour lui, ils le suivaient depuis plus de deux ans, supportaient avec lui toutes sortes de désagréments…, et ils ne savaient même pas dire qui était Jésus pour eux ! Ah, si le Seigneur lui-même leur avait suggéré la réponse ! Ah, si la réponse était venue du ciel ! Mais non. Ils ne purent rien dire. Jésus était un mystère, et ils ne parvinrent pas à l’exprimer comme cela, simplement.

          Alors, quand Pierre prit la parole, se fut comme si sa voix se faisait l’écho qu’un profond abîme rendait d’un coup de tonnerre venu du ciel :

          Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant !

          Pierre fut si surpris par sa réponse qu’il se demanda si c’était lui ou un autre du groupe qui l’avait donnée. Il pensa instinctivement à Jean. Comme en songe, il accueillit alors les paroles de Jésus, paroles qu’il ne pouvait plus cette fois croire adressées à un autre :

          Tu es heureux, Simon fils de Jonas, car cette parole t’est venue, non de la chair et du sang, mais de mon Père qui est dans les cieux. Eh bien ! moi je te dis : Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise et les portes de l’Hadès ne tiendront pas contre elle.