Deutéronome 5, 1-22

Le don de la Loi

Saint Irénée de Lyon

Contre les Hérésies, IV, 16, 2-4, p. 452ss

 

          Dans les temps anciens, l’homme n’était pas justifié par les pratiques d’autrefois : elles avaient été données au peuple comme des signes. Abraham lui-même sans circoncision, ni observation du sabbat, crut à Dieu, et cela lui fut imputé à justice, et il fut apprécié de Dieu. Lot, lui aussi, bien que non circoncis, fut emmené hors de Sodome et obtint de Dieu le salut. Noé reçut les dimensions du monde de la nouvelle naissance. Enoch lui aussi, ayant plu à Dieu sans circoncision, était envoyé come ambassadeur auprès des anges, quoiqu’il fût homme. Et toute la multitude des autres justes antérieurs à Abraham et des patriarches antérieurs à Moïse fut justifiée sans les pratiques d’antan et sans la Loi de Moïse, comme Moïse lui-même le dit au peuple dans le Deutéronome : Le Seigneur ton Dieu a conclu une alliance sur l’Horeb ; et ce n’est pas avec vos pères que le Seigneur a conclu cette alliance, mais avec vous-mêmes.

          Pourquoi donc n’est-ce pas avec leurs pères que le Seigneur conclut l’alliance ? Parce que la Loi n’a pas été établie pour le juste. Or, justes, ils l’étaient, leurs pères, eux qui avaient le contenu du Décalogue inscrit dans leurs cœurs et dans leurs âmes, puisqu’ils aimaient le Dieu qui les avaient créés et qu’ils s’abstenaient de toute injustice à l’égard de leur prochain : ils n’avaient pas besoin d’une Ecriture qui les avertît, car ils possédaient en eux-mêmes la justice de la Loi. Mais lorsque cette justice et cet amour envers Dieu furent tombés dans l’oubli et se furent éteint en Egypte, il fallut bien que Dieu, à cause de son grand amour des hommes, se manifestât de vive voix ; et il fit sortir d’Egypte son peuple par sa puissance, afin que l’homme redevînt le disciple et le compagnon de Dieu ; et il châtia les désobéissants, afin qu’il ne méprisât pas Celui qui l’avait créé ; et il le nourrit de la manne, afin qu’il reçut un aliment spirituel, selon que Moïse dit dans le Deutéronome : Il t’a nourri de la manne, que ne connaissaient pas tes pères, afin que tu saches que l’homme ne vivra pas de pain seulement, mais que l’homme vivra de toute parole qui sort de la bouche de Dieu. Et il prescrivit l’amour envers Dieu, et enseigna la justice à l’égard du prochain, afin que l’homme ne fût ni injuste, ni indigne de Dieu. Ainsi, par le Décalogue, préparait-il l’homme à son amitié et à la concorde à l’égard du prochain : ces choses étaient profitables à l’homme lui-même, et Dieu ne sollicitait de lui rien de plus.