Jean 12, 1-11

La bonne odeur du Seigneur

Saint Augustin

Sermon 50, 6-10, sur saint Jean, OC 10, p. 142s

 

          Qui que tu sois, si tu veux être une âme fidèle, répands avec Marie un parfum précieux aux pieds du Seigneur. Ce parfum, c’est la justice. Répands du parfum sur les pieds de Jésus, suis les traces du Seigneur par une vie sainte. Essuie ses pieds avec tes cheveux.

          Et la maison s’emplit de la senteur du parfum.  Le monde s’est rempli de la bonne renommée de cette femme, car la bonne odeur, c’est la bonne renommée. Le nom de Dieu est loué par les bons chrétiens, car, comme le dit l’apôtre Paul : nous sommes bien la bonne odeur du Christ. Il est dit aussi dans le Cantique des cantiques : Ton nom est un parfum répandu. Rapproche ces paroles de celles de l’apôtre : Nous sommes bien la bonne odeur du Christ, parmi ceux qui se sauvent et parmi ceux qui se perdent ; pour les uns, une odeur qui de la mort conduit à la mort ; pour les autres, une odeur qui de la vie conduit à la vie. Et qui donc est à la hauteur d’une telle tâche ?

          Remarque, à propos du parfum de Marie, comment la bonne odeur était aux uns pour la vie, aux autres pour la mort. A peine la pieuse Marie eut-elle donné au Seigneur ce témoignage de vénération, que Judas, l’Iscariote, l’un de ses disciples, celui qui allait le livrer, dit alors : Pourquoi n’a-t-on pas vendu ce parfum trois cents deniers pour les donner aux pauvres ? Malheur à toi, malheureux Judas, la bonne odeur t’a donné la mort. Car le saint Evangile nous découvre le pourquoi de ses paroles. Nous penserions, si l’Evangile ne nous révélait la pensée de Judas, que le souci des pauvres avait pu le faire parler de la sorte. Mais ce n’est pas vrai. Ecoute un témoin véridique : Il ne disait pas cela par souci des pauvres, mais parce que c’était un voleur, et que, tenant la bourse, il dérobait ce qu’on y mettait.

          Ainsi vous remarquez que la perversion de Judas n’a pas commencé le jour où, corrompu par les Juifs, il leur a livré le Seigneur. Bien avant, il était un voleur ; c’est un homme perverti qui suivait le Seigneur, car il le suivait non de cœur, mais seulement de corps.