Colossiens 3, 1-17

Support et pardon  mutuels

Karl Rahner

Homélies bibliques, p. 155s

 

           Dans cette exhortation à la vertu que Paul adresse aux Colossiens et que nous venons d’entendre, l’apôtre exhorte à la douceur et ensuite au pardon : Supportez-vous les uns les autres et pardonnez-vous mutuellement. C’est de là qu’il faut partir pour comprendre cette exhortation à la paix, car on ne vise pas seulement la paix du cœur de chacun en soi-même, mais la paix les uns avec les autres. Paul fonde cette exhortation à la paix en disant : Vous êtes appelés à former un seul corps, et exhorte au support et au pardon mutuels. Il faut nous représenter cette communauté : elle est ardente ; ce sont tous de nouveaux chrétiens, des nouveaux convertis, avec l’enthousiasme d’un chrétien nouveau converti, qui sait qu’il doit briller comme une étoile au milieu d’un monde de ténèbres, une communauté dans laquelle chacun s’est fait chrétien par conviction très intime, en s’opposant à toutes les influences de son milieu. C’est donc une communauté qui prend le christianisme véritablement au sérieux, une communauté qui s’est réunie et dont chaque membre sait que chacun partage avec l’autre ce qu’il y a de plus grand et de plus profond dans son cœur et dans sa vie : cette décision extraordinaire pour le Christ et son salut. Néanmoins, Paul exhorte au support et au pardon mutuels. Chez Paul, cette exhortation est déjà prête d’avance, pourrait-on presque dire ; ce n’est manifestement pas une exhortation qui doit tenir compte tout particulièrement de circonstances extraordinaires qui caractérisent cette communauté précise, car Paul fait aussi presque exactement la même exhortation dans la lettre aux Ephésiens (4,31-32). Il faut donc que cette exhortation présente une importance manifeste pour tout chrétien. Si nous consultons le Sermon sur la Montagne de Jésus, nous voyons aussi comment on y exhorte au pardon et à la réconciliation, et comment, dans une sorte d’imitation d’un enseignement vétéro-testamentaire du livre de l’Ecclésiastique, au chapitre 28, on y fonde cette exhortation en disant que nous ne pouvons demander le pardon de Dieu que si nous sommes prêts à pardonner à nos semblables : Pardonnez et il vous sera pardonné. Etant donné cet enseignement de Jésus, il n’est pas étonnant, ni étrange, à proprement parler, que Paul reprenne cette exhortation de Jésus et l’inscrive dans le cœur de cette communauté. Qu’en est-il pour nous aujourd’hui ? Est-ce aussi pour nous une exhortation sans cesse nécessaire ?