Cantique des cantiques 2,8-14 + 8,6-7

Présence de la Trinité en Marie

Saint Bernard

Sermons divers, SC 518, sermon 52 : Sur Marie, p. 345s

 

          Dans la bienheureuse Marie, la sainte Trinité a résidé, je parle ici d’une présence de majesté, alors que seul le Fils y résidait en raison de l’humanité qu’il assumait. C’est ce qu’atteste l’envoyé du ciel qui dévoile en Marie le mystère caché en disant : L’Esprit viendra sur toi et la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre. Tu as donc ici le Très-Haut, tu as la puissance, tu as l’Esprit-Saint, autrement tu as le Père, le Fils et  l’Esprit-Saint. Que le Père ne puisse être sans le Fils, ni le Fils sans le Père, ni l’Esprit sans l’un et l’autre, le Fils lui-même nous l’enseigne : Je suis dans le Père, ditil, et le Père est en moi. Et plus loin : Le Père qui demeure en moi, c’est lui qui accomplit les œuvres. Il est évident que dans le cœur de la Vierge résidait la foi en la sainte Trinité.

          Marie a-t-elle aussi possédé les quatre principales vertus, comme les quatre colonnes ? Commençons par voir si elle a possédé la force. Comment celle-ci, assurément, aurait-elle pu lui manquer, alors que Marie, rejetant les honneurs du monde et méprisant les jouissances de la chair, avait pris la décision de vivre pour Dieu seul dans la virginité ? Si je ne me trompe, cette Vierge est celle dont, chez Salomon, on lit ceci : La femme forte, qui la trouvera ? Elle a plus de prix que ce qui vient des extrémités du monde. Elle eut assez de force pour écraser la tête de ce serpent auquel le Seigneur avait dit : Je mettrai une hostilité entre toi et la femme, entre ton lignage et le sien : elle t’écrasera la tête.

Par ailleurs, qu’elle ait été modérée, prudente et juste, nous en trouvons la preuve plus claire que le jour dans les paroles que l’ange lui adressa, et dans sa propre réponse. Lorsque l’ange si solennellement s’adresse à elle : Salut, Marie, comblée de grâce, le Seigneur est avec toi, elle ne s’enorgueillit pas comme si elle recevait en bénédiction un privilège extraordinaire de la grâce. Non, elle garda le silence, en se demandant en elle-même ce que voulait dire cette salutation inusitée. Qu’est-ce là, sinon de la modération ?

Quant à sa justice, elle en donne la preuve insigne lorsqu’elle confesse qu’elle est la servante du Seigneur. En effet, que la confession caractérise les justes, en voici l’attestation dans cette parole : oui, les justes confesseront ton nom, les hommes droits habiteront avec ton visage. La bienheureuse Vierge Marie s’est donc montrée forte dans sa décision, modérée dans son silence, prudente dans sa question, juste dans sa confession.