Jean 15, 9-17

« Vous êtes mes amis »

Saint Grégoire le Grand

Homélie 27 sur le grand commandement, SC 522, p. 169s

 

          Vous êtes, vous, mes amis. Qu’elle est grande la miséricorde de notre Créateur ! Nous ne sommes pas de dignes serviteurs, et il nous appelle ses amis ! Quelle dignité pour des hommes d’être les amis de Dieu ! Glorieuse dignité, vous avez entendu ; mais écoutez aussi ce qu’est le labeur du combat : Si vous faites ce que moi je vous commande. Vous êtes mes amis si vous faites ce que je vous commande. Comme s’il disait clairement : au sommet est la joie, mais voyez bien par quels efforts on parvient au sommet. Lorsque les fils de Zébédée, par l’entremise de leur mère, demandèrent de siéger l’un à droite, l’autre à gauche de Dieu, ils s’entendirent répondre : Pouvez-vous boire la coupe que je vais boire ? Ils cherchaient un haut rang ; la vérité leur en rappelle le chemin. Comme si elle disait : un haut rang vous plaît, mais d’abord entraînez-vous aux fatigues du chemin. C’est par la coupe que l’on atteint à la grandeur. Si votre esprit recherche ce qui lui est agréable, buvez d’abord ce qui fait souffrir. Ainsi, oui, par la coupe amère du médicament, on parvient à la joie du salut.

          Je vous ai appelés mes amis, parce que tout ce que j’ai entendu de mon Père, je vous l’ai fait connaître. Quelles sont toutes ces choses qu’il a entendues de son Père, qu’il a voulu faire connaître à ses serviteurs pour en faire ses amis, sinon les joies de la lumière intérieure, sinon les fêtes de la patrie d’en-haut, dont il met quelque chose chaque jour au plus profond de nos cœurs par le souffle de son amour ? En effet, quand nous aimons les réalités supra-célestes dont il nous parle, déjà, en les aimant nous les connaissons, car l’amour même est connaissance. Il avait tout fait connaître à ceux qui, sans se laisser affecter par les désirs terrestres, brûlaient des feux d’un très grand amour.

          Celui qui est ainsi parvenu à la dignité d’être appelé ami de Dieu, qu’il regarde en lui-même ce qu’il est, et au-dessus de lui-même les dons qu’il reçoit. Qu’il n’en attribue rien à ses propres mérites : tout vient de Dieu, lui qui aime ses amis.