Marc 14, 12-16 + 22-26

« Ceci est mon Corps, ceci est mon Sang »

Adrienne von Speyr

Saint Marc, points de méditation pour une communauté, p. 637s

         

          Il s’agit maintenant de contempler le grand miracle, le miracle au milieu des croyants, le miracle qui est là seulement pour eux, le miracle de la foi par excellence : Prenez, ceci est mon Corps. La parole contient le miracle. Le pain apparaît aux disciples exactement tel qu’il était auparavant. Il est devenu le Corps du Christ. Et le Seigneur exige de leur foi qu’ils le reçoivent comme son Corps sans laisser place au doute. Il suffit qu’il le dise pour qu’il en soit comme il le dit. Et ils doivent prendre ce pain comme ils ont jusqu’ici mangé tout morceau de pain. Nous voyons en esprit cette assemblée d’hommes simples auxquels le miracle est présenté de façon inconditionnelle. Et le Seigneur attend, inconditionnellement, qu’ils lui fassent confiance. C’est un miracle, opéré pour les croyants. Et ce n’est pas le moindre miracle dans ce miracle, que rien n’ait changé apparemment, qu’il ne soit absolument pas perceptible par les sens, pendant que ce pain est devenu le Corps du Christ. Lors des autres miracles, il y a des restes, des reliquats : l’aveugle voit, mais, dans un premier temps, il voit des hommes comme des arbres qui marchent ; Lazare ressuscite, mais encore enveloppé de linges ; on rapporte un certain nombre de corbeilles avec des restes de poissons et de pains. Ici, en revanche, il n’y a pour les sens ni avant, ni après. L’après, le plein du miracle, doit avoir lieu en ceux qui ont mangé le pain. Ils reçoivent part au Corps du Christ, et cette part agit en eux comme un aliment, un aliment divin ; c’est pour l’offrir que le Seigneur est venu dans ce monde. Et les disciples ne répondent rien. Ils se laissent introduire par la parole du Seigneur dans la langue de son miracle et reçoivent son Corps comme ils ont jusqu’ici reçu de sa main tout morceau de pain.

            Le Seigneur n’a pas encore subi sa Passion ; personne n’a remarqué jusqu’alors  que son sang est répandu. Et voilà qu’il dit : Ceci est mon Sang, le Sang de l’Alliance, qui va être répandu pour la multitude. Mais qu’il soit bientôt ou déjà répandu n’est pas essentiel, car toute la vie humaine du Seigneur est placée sous le signe de la Rédemption. Il est venu pour mourir, il porte en lui dès sa naissance les signes de la mort sur la croix. Il est venu pour racheter en mourant. Et voici que dans cette coupe, il y a son Sang répandu : le même mystère que dans le pain qui est son Corps. C’est le miracle par excellence, justement parce que rien n’est perçu par les disciples. C’est le miracle de la foi qui seule est capable de le saisir, de l’approuver, qui l’accepte sans autre preuve que la parole du Seigneur, parole qui est la vérité à tel point qu’il est lui-même la Parole. C’est le Sang de la Nouvelle Alliance : celle-ci n’est pas un prolongement de l’Ancienne, elle est plus profondément son surpassement par le sacrifice du Fils.