1 Samuel 5,1 – 6,4+10-12

Le renvoi de l’Arche

Saint Augustin

Sermon sur le psaume 77, 36s, OC 13, p. 447s

 

          Il livra captive leur force, aux mains de l’ennemi leur splendeur. Par leur force et leur splendeur, le psalmiste désigne l’Arche que les Hébreux s’enorgueillissaient de posséder et avec laquelle ils se croyaient invincibles. C’est ainsi que plus tard, comme les Juifs vivaient dans le désordre et se glorifiaient de posséder le Temple du Seigneur, Dieu leur fit cette menace par la bouche du prophète Jérémie : Voyez ce que j’ai fait à Silo, où était mon tabernacle.

            Il remit son peuple à l’épée, contre son héritage il s’emporta. Ses cadets, le feu les dévora, ses vierges n’eurent pas le chant de noces. La crainte des ennemis n’en laissait pas le loisir !

            Ses prêtres tombèrent sous l’épée, ses veuves ne firent pas de lamentations. Les fils d’Eli sont tombés sous le glaive, et la veuve de l’un d’entre eux, mourant à cette nouvelle dans les douleurs d’un enfantement prématuré, ne fut point pleurée lors de ses funérailles à cause du trouble de tout le peuple.

            Et le Seigneur, le Maître s’est éveillé comme s’il avait dormi jusqu’alors. En effet, il semble dormir lorsqu’il livre son peuple aux mains de ceux qui le haïssent, de sorte qu’on peut dire à ce peuple : Où est-il ton Dieu ? Il s’est donc éveillé comme s’il avait dormi ; il s’est éveillé comme un homme vaillant terrassé par le vin. Nul, si ce n’est l’Esprit de Dieu, n’oserait parler de lui en des termes semblables. Il a dit, en effet, que Dieu dort longtemps, comme un homme ivre, lorsqu’il ne vient pas au secours des hommes aussi vite que ceux-ci le voudraient.

            Il a frappé ses ennemis au dos. Il s’agit ici des Philistins qui se réjouissaient d’avoir pu prendre l’Arche, et qui furent affligés de maladies honteuses. Ces maladies me semblent être la figure des peines qui seront infligées à quiconque aura regardé par derrière lui et regardé, comme le dit Paul, comme des ordures. Ceux qui veulent faire alliance avec Dieu, sans se dépouiller de leur vanité, sont semblables à ces peuples ennemis qui avaient placé près de leurs idoles l’Arche d’Alliance tombée en leur pouvoir. Les dépouilles du vieil homme tombent quelquefois d’elles-mêmes, alors qu’ils ne le veulent pas, car toute chair n’est que foin et la gloire de l’homme est comme la fleur du foin. Le foin s’est desséché, sa fleur est tombée, mais l’Arche du Seigneur demeure éternellement, c’est-à-dire le mystère de l’Alliance du Seigneur, le Royaume des cieux où réside le Verbe éternel de Dieu. Mais ceux qui  ont aimé les choses qui sont derrière eux souffriront, en toute justice, par ces choses elles-mêmes, car Dieu les a livrés à un opprobre éternel.