1 Samuel 1, 1-19

Stérilité et désir d’enfant

Saint Jean Chrysostome

Discours 1 sur Anne, n° 4-6

         

          Il y eut chez les Juifs une femme nommée Anne. Elle souffrit longtemps d’être stérile, et, ce qui lui était encore plus pénible, sa rivale avait beaucoup d’enfants. En outre, celle-ci traitait Anne avec mépris pour la pousser à bout.

            Dieu voyait tout cela et laissait faire. Le texte de la Septante dit que le Seigneur ne donna pas de fils à Anne en considération de sa peine et du désespoir de son cœur. Qu’est-ce que cela veut dire ? Non pas que Dieu, en voyant Anne supporter son malheur avec douceur, l’empêcha positivement d’avoir un enfant, mais que, la voyant brisée, affligée, tourmentée, il ne mit pas fin aussitôt à son désespoir : en fait il préparait quelque chose de bien meilleur.

            Tirons, frères, de cette histoire une leçon de haute sagesse ; ainsi quand nous tomberons dans quelque malheur, nous ne nous agiterons pas, nous ne perdrons pas cœur, mais attendrons l’heure de la Providence. C’est ce que fit Anne. Dieu n’avait pas fermé son sein par haine ou aversion à son égard ; il voulait nous ouvrir la porte de la sagesse que possédait cette femme, nous dévoiler le trésor de sa foi, nous enseigner la gloire qu’elle tira de son malheur.

            Le plus admirable chez Anne, ce qui montre, plus que tout, son amour de Dieu, c’est qu’elle ne désirait par avoir un enfant simplement pour l’enfant lui-même, mais elle promettait de consacrer à Dieu le fruit de ses entrailles, pour lui offrir les prémices de son sein et recevoir ainsi le salaire de sa belle promesse. Qu’est-ce qui le prouve ? Les paroles qui suivent : Adonaï, Seigneur, Eloï Sabaoth, si tu voulais jeter les yeux sur ton humble servante. Elle n’a encore rien reçu et déjà elle commence sa prière par une promesse : elle fait à Dieu l’offrande de son fils en retour du don que Dieu lui fait de son enfant, alors qu’elle ne tient encore rien dans ses mains ! Tel est le motif principal de son ardent désir, la raison pour laquelle elle supplie qu’un enfant lui soit donné. Donne-moi, à moi, ta servante, un petit d’homme et je te le donnerai pour qu’il soit consacré en ta présence jusqu’au jour de sa mort. Qu’est-ce à dire : consacré en ta présence ? Ceci : il sera totalement livré à ton service, donné sans partage. Je renoncerai à tous mes droits. Si je désire devenir mère, c’est uniquement pour donner la vie à un fils ; ensuite, je renonce à lui et me retire.

            Remarque la piété de cette femme. Elle ne dit pas : Si tu me donnes trois fils, je t’en donnerai deux ; si tu m’en donnes deux, je t’en donnerai un, mais Si tu me donnes seulement un enfant, je te consacre sans partage le fruit de mes entrailles.