1 Samuel 1,20-28 + 2,11-21

Anne respectait son enfant comme appartenant déjà au Seigneur

Saint Jean Chrysostome

Discours 3 sur Anne, n° 1-2

         

          Allons trouver Anne, et apprenons d’elle comment elle se comporta avec le fils qu’elle avait reçu de Dieu. Elle restait dans la maison, dit l’Ecriture, et elle allaitait Samuel. Tu le vois, elle ne regardait pas seulement cet enfant comme un enfant, mais comme un être consacré à Dieu ; elle l’entourait d’une double tendresse, l’une qui venait de la nature, l’autre de la grâce.

          Si l’on se propose de consacrer à Dieu des coupes ou des vases en or, on les garde dans sa maison en attendant le jour fixé pour la consécration ; on ne les considère pas comme des vases profanes et communs, mais comme des objets sacrés, et l’on n’ose pas les manier n’importe comment, à la manière de vases ordinaires. Les sentiments d’Anne à l’égard de son enfant, même avant de l’avoir conduit au temple, étaient de cet ordre, et encore bien plus forts. Elle l’aimait beaucoup plus qu’on aime un enfant ; elle s’occupait de lui comme d’un être appartenant au Seigneur ; elle l’estimait sanctifiée par son intermédiaire.

          Quand elle eut sevré Samuel, Anne conduisit au temple son trésor et l’y laissa. L’enfant supporta sans se fâcher cet arrachement du sein maternel. Pourtant, on sait quelles difficultés font les petits enfants quand on veut les sevrer. Mais Samuel, séparé de sa mère, ne pleura pas, il tourna ses regards vers le Seigneur qui avait donné à Anne le don de maternité.

          Anne, de son côté, ne s’affligea point d’être éloignée de son enfant ; la grâce l’aidait à surmonter les sentiments de la          nature, et il leur semblait à tous deux n’avoir qu’une même vie. Comme une vigne, plantée en terre, étend au loin ses sarments, au bout desquels pend une grappe unie à la souche malgré l’éloignement, ainsi Anne, tout en restant dans sa ville, voyait un rameau issu d’elle s’étendre jusqu’au temple et maintenir, là, suspendue, une grappe de toute beauté. La distance n’était pas un obstacle, car un amour vraiment divin attachait l’un à l’autre, l’enfant et sa mère.