Jean 15, 1-8

« Je suis le cep, vous les sarments »

Père Léopold Sabourin

les noms et les titres de Jésus, p. 106s

 

          L’intérêt que porte les auteurs bibliques à la vigne correspond, en partie, aux renseignements que nous fournit la littérature profane : les anciens avaient pour la vigne une estime qui pouvait aller jusqu’au culte. Selon la Bible, la vie de l’homme a son siège dans le sang, et le vin, dans la Genèse, est appelé sang des raisins ; une tradition para-biblique, que l’on trouve dans le livre d’Hénoch, identifie l’arbre de la connaissance avec la vigne. Quand on songe à l’aspect eschatologique de la notion de création, on s’étonne moins que la vigne figure, avec le figuier, comme plante des temps messianiques. Le Nouveau Testament reprend cette donnée en faisant du vin nouveau un symbole des temps messianiques.

          En général, l’image de la plantation sert à désigner la communauté messianique. Aussi, lit-on, dans une section postexilienne du livre d’Isaïe, à propos des rescapés d’Israël : On les appellera générations de justice et plantation du Seigneur pour sa gloire. Les psaumes apocryphes de Salomon, à la veille de l’ère chrétienne, précisaient : Le paradis du Seigneur, l’arbre de vie, ce sont les saints ; leur plantation est enracinée pour l’éternité ; on ne les arrachera pas pendant toute la durée du ciel. Dans les écrits du Qumrân, la communauté des justes est aussi comparée à une plantation éternelle.

          L’espérance messianique comptait sur l’établissement, au jour du Seigneur, d’un nouvel Israël, donc d’une nouvelle vigne, sans soupçonner encore que le Messie s’identifierait en quelque sorte avec cette vigne. Mais une allusion en ce sens apparaît dans la version grecque du psaume 80 (Ps 79,16), où le parallélisme associe la vigne, Israël, avec un Fils de l’homme messianique. Un apocryphe du premier siècle (2 Baruch 39,7) reflète sans doute une tradition pré-chrétienne, lorsqu’il décrit ainsi un tournant eschatologique de l’histoire : Alors sera révélée la principauté de mon Messie, lui qui est semblable à la source et à la vigne ; et quand il sera révélé, sera extirpée sa grande troupe du royaume impie. La réalité allait dépasser toutes les attentes.