Genèse 8, 1-22

Du rang à garder dans la communauté

Dom Adalbert de Vogüé

La Règle de saint Benoît, VII : commentaire doctrinal et spirituel, p. 422

 

Les relations mutuelles selon le rang sont définies dans la Règle de saint Benoît par une maxime qui reproduit, à peu de choses près, deux instruments des bonnes œuvres : Les jeunes honoreront les anciens, les anciens aimeront leurs inférieurs. Cette façon de différencier les rapports, en présentant la dilection comme un mouvement de haut en bas qui répond à l’honneur, suit d’assez près l’analyse que font les Epîtres de la Captivité entre mari et femme, donc entre le Christ et l’Eglise : à la soumission et au respect de l’une répond la dilection de l’autre. On songe aussi à la relation parents-enfants décrite par saint Paul aussitôt après : la soumission des seconds se fonde sur le précepte d’honorer père et mère, tandis que ceux-ci sont invités à faire preuve de leur bienveillance envers leurs fils.

Cependant, ce schéma trop simple ne tarde pas à se nuancer. L’honneur n’est pas seulement rendu par les jeunes aux anciens. Ceux-ci, de leur côté, sont astreints à témoigner certains égards à leurs inférieurs. Le titre de frères qu’ils doivent donner est sans doute empreint d’affection familière, mais il exprime aussi un respect religieux qui n’apparaît pas quand on appelle un autre par son nom tout court. On peut donc dire que les honneurs sont mutuels, comme le veut le mot de saint Paul que Benoît citera en conclusion : Rivalisez d’estime réciproque.

A leur tour, la dilection n’est pas réservée à la relation des anciens aux jeunes. En parlant des titres donnés à l’Abbé pour l’honneur du Christ, Benoît suggère que la dilection accompagne le respect dans le mouvement de bas en haut.  A vrai dire, amour et honneur ne sont pas inséparables. L’amour est respectueux, et le respect implique toujours, en définitive, quelque amour.