Jean 13, 31-35

« Je vous donne un commandement nouveau »

Saint Augustin

Commentaire de l’évangile de saint Jean, Homélie 15

 

Je vous donne un commandement nouveau, c’est de vous aimer les uns les autres. Est-ce que ce commandement n’existait pas dans l’ancienne Loi de Dieu, où il est écrit : Tu aimeras ton prochain comme toi-même ? Pourquoi le Seigneur appelle-t-il nouveau un commandement si nettement ancien ?

Ne serait-ce pas un commandement nouveau en ce sens qu’il nous dépouille du vieil homme pour nous revêtir de l’homme nouveau ? En effet, celui qui entend ce commandement, ou plutôt celui qui lui obéit, se trouve renouvelé, non par un quelconque amour, mais par cet amour que le Seigneur distingue de l’amour charnel, quand il ajoute : …comme je vous ai aimés. Le commandement nouveau que nous donne le Christ, c’est que nous nous aimions les uns les autres, comme il nous a aimés.

Cet amour-là renouvelle et fait de nous des hommes nouveaux, héritiers de la nouvelle alliance, chantres d’un cantique nouveau. Cet amour a renouvelé les justes des temps anciens,les patriarches et les prophètes, ainsi que, plus tard, les bienheureux apôtres. Cet amour renouvelle encore les nations et tout le genre humain répandu sur la terre : de tous, en les réunissant, il fait un peuple nouveau, le corps de cette nouvelle épousée du Fils unique de Dieu. Voilà pourquoi, dit saint Paul, tous les membres ont le souci les uns des autres ; si un membre souffre, tous les membres souffrent avec lui ; si un membre est glorifié, tous se réjouissent avec lui. Il s’aiment parce qu’ils sont tous des dieux et des fils du Très-Haut, pour devenir ainsi les frères du Fils unique de Dieu, en s’aimant mutuellement de cet amour dont il les aima lui-même, et qui doit amener à cette fin, seule suffisante, où il rassasiera de biens tous les désirs. 

A qui l’entend bien, chacun des deux commandements se retrouve dans l’autre. Car celui qui aime Dieu ne peut pas mépriser Dieu qui commende d’aimer le prochain ; et celui qui aime saintement, spirituellement son prochain, qu’aime-t-il en lui si ce n’est Dieu ? Voilà l’amour que le Seigneur a spécifié en ajoutant :…comme je vous ai aimés.

Qu’a-t-il aimé en nous si ce n’est Dieu ? Non pas Dieu que nous avions, mais afin que nous l’ayons, pour nous amener là où Dieu est tout en tous. C’est dans ce sens que l’on dit, avec raison que le médecin aime ses malades : et qu’aime-t-il en eux ? La santé qu’il désire leur rendre et non la maladie dont il veut les délivrer.