Néhémie 7,72b – 8,18

Saint Irénée de Lyon

Pape Benoît XVI

La sainteté ne passe pas, p. 119s

 

Saint Irénée est avant tout un homme de foi et un pasteur. Du bon Pasteur, il possède le sens de la mesure, la richesse de la doctrine, l’ardeur missionnaire. En tant qu’écrivain, il poursuit un double objectif : défendre la véritable doctrine des attaques des hérétiques, et exposer avec clarté les vérités de la foi. Les deux œuvres qui nous sont parvenues de lui, correspondent exactement à ces objectifs : les cinq livres Contre les Hérésies, et L’Exposition de la prédication apostolique, que l’on peut également appeler le plus ancien catéchisme de la doctrine chrétienne. En définitive, Irénée est le champion de la lutte contre les hérésies. L’Eglise du deuxième siècle était menacée par ce que l’on appelle la gnose, une doctrine qui affirmait que la foi enseignée dans l’Eglise ne serait qu’un symbolisme destiné aux personnes simples, qui ne sont pas en mesure de comprendre les choses difficiles ; au  contraire, les initiés, les intellectuels, on les appelait les gnostiques, auraient compris ce qui se cache derrière ces symboles, et auraient formé un christianisme élitiste et intellectuel. Bien sûr, ce christianisme intellectuel se fragmentait toujours plus en divers courants de pensées souvent étranges et extravagants, mais qui attiraient de nombreuses personnes. Un élément commun de ces divers courants était le dualisme, c’est-à-dire que l’on niait la foi dans l’unique Dieu, Père de tous, Créateur et Sauveur de l’homme et du monde. Pour expliquer le mal dans le monde, ils affirmaient l’existence auprès de Dieu bon, d’un principe négatif. Ce principe négatif aurait produit les choses matérielles, la matière.


En s’enracinant solidement dans la doctrine biblique de la création, Irénée réfute le dualisme et le pessimisme gnostique qui sous-évaluaient les réalités corporelles. Il revendiquait fermement la sainteté originelle de la matière, du corps, de la chair, ainsi que de l’esprit. Mais son œuvre va bien au-delà du rejet de l’hérésie : on peut dire, en effet, qu’il se présente comme le premier grand théologien de l’Eglise, qui a créé la théologie systématique ; lui-même parle du système de la théologie, c’est-à-dire de la cohésion interne de toute la foi. Au centre de sa doctrine réside la question de la règle de la foi et de sa transmission. Pour Irénée, la règle de la foi coïncide, en pratique, avec le Credo des Apôtres et nous donne la clé pour interpréter l’Evangile, pour interpréter le Credo à la lumière de l’Evangile. Le symbole apostolique, qui est une sorte de synthèse de l’Evangile, nous aide à comprendre ce qu’il veut dire, et la façon dont nous devons lire l’Evangile lui-même.