Job 42, 7-17

La sentence de Dieu : Job est rétabli comme intercesseur

Henri de Ternay

L’épilogue, p. 156s

 

Cette sentence de Dieu est particulièrement surprenante. Le narrateur emploie un style direct et n’hésite pas à laisser entendre que Dieu manifeste une grande colère contre Eliphaz, le premier des amis de Job, mais également contre les deux autres, car ils n’ont pas parlé correctement de lui, comme l’a fait son serviteur Job. Ils doivent maintenant aller à la rencontre de celui qu’ils n’ont cessé de maltraiter, en se basant sur une doctrine que Dieu lui-même traite de stupidité ou de folie. Les amis doivent recourir à l’aide du serviteur du Seigneur qui est investi de la fonction d’intercesseur. Quel changement radical de situation ! Voici que, celui qui était traité d’impie en raison de sa révolte, va devenir l’intercesseur pour ceux qui n’arrêtaient pas de l’accuser. C’est ainsi qu’il va exercer son rôle de serviteur de Dieu, comme au prologue.

Intercéder est une prérogative que le serviteur partage avec le prophète. La figure du serviteur de Dieu, dans le Deutéro-Isaïe, s’inscrit dans une grande tradition prophétique. Plusieurs aspects rapprochent les récits en prose du livre de Job du quatrième chant du Serviteur. L’expression mon serviteur Job est reprise du prologue. Elle apparaît trois fois au verset 8. Les amis de Job affirmaient des choses fausses contre Dieu. Pour cette raison, la colère divine s’enflamme contre eux. Job, devenu le Serviteur de Dieu, servira d’intermédiaire pour leur réconciliation avec Dieu. Les victimes seront sept taurillons et sept béliers. Job doit jouer le rôle d’intercesseur comme Abraham en Genèse (20,7), Moïse en Nombres (31,7), Samuel dans le premier livre (7,5 et 12,1), et même Jérémie (7,3). Dieu eut égard à Job. L’expression est classique quand on parle d’holocaustes. Aucune mention n’est faite d’Elihu.

Même si Job reçoit de nouveau tous ses biens, et, s’il les reçoit en double, il ne s’agit plus d’une restauration, tel un retour à la case départ. Il s’agit bien plutôt de la manifestation d’une entrée dans l’excellence de la grâce. A partir de la sentence de Dieu, les amis ne pouvaient pas triompher, imaginant que Job aurait reçu ses richesses parce qu’il s’était converti. De cette manière, Dieu leur aurait donné raison. Non, le seigneur fut formel : les visiteurs ont mal parlé de lui, et la doctrine à laquelle ils ont eu recours relève de la stupidité ! Même s’il s’est effectivement converti et rétracté, on ne peut penser au rétablissement de Job sur une base nettement rejeté par Dieu. Rien n’est dit d’une guérison des souffrances qui atteignaient Job, mais on peut penser qu’il en a été délivré, puisque tant de signes de bonheur sont évoqués : la naissance de fils et de filles, de même que le nombre significatif de cent quarante ans (douze fois douze) de vie. La restauration du héros est immédiatement suivie de sa réintégration sociale.