Isaïe 8, 1-18

Complot contre Dieu et naissance d’un fils au prophète Isaïe

Père Jean Steinmann

Le prophète Isaïe, sa vie, son œuvre et son temps, p. 99s

 

          Par la vision inaugurale, Dieu avait comme contraint Isaïe à tourner le dos à son peuple pour suivre une route inverse et prendre le contre-pied de l’opinion publique. Les contemporains d’Isaïe attribuent à Rason et à Peqah un odieux complot contre Jérusalem. Mais le prophète pense que ces deux rois ennemis de Juda ne sont que de misérables fantoches de la politique, des bouts de tisons fumants. Le seul conspirateur dont l’action pourrait justifier l’affolement de la cour d’Achaz, c’est Dieu lui-même. C’est lui qui a provoqué la guerre syro-éphraïmite afin d’éprouver la foi des dirigeants de son peuple. C’est lui, Dieu, et non Achaz, qui plongera le pays dans le chaos, afin de provoquer la chute de ceux qui ne croient pas en lui. Ce petit poème (les versets 11 à 15) confirme les propos de Dieu dans la vision inaugurale. On voit se dessiner les lignes précises du projet divin : Rason, Peqah et Téglat-Phalasar sont les mailles du piège que tend le Seigneur, du filet où il va enlacer ses ennemis.

          Achaz a disparu de l’horizon du prophète qui, sans illusion, sait n’avoir rien à faire auprès du roi. Mais Isaïe fait porter son effort sur ceux des courtisans qui restent capables de comprendre les rudes et terribles leçons du Seigneur.

          Mû par l’inspiration, le prophète fait appel à deux de ses amis : le grand prêtre Ourriyah, connu par le livre des Rois, et Zacharie, le beau-père du roi. En leur présence, dans un geste qui rappelle celui du Zacharie de l’évangile à la naissance de Jean-Baptiste, Isaïe inscrit, sur une tablette qu’il leur confie, le nom du fils qu’il doit avoir dans neuf mois.

          Dans le délai prévu, la naissance a lieu. Comme celui d’Emmanuel et de Shear-Iashoub, le nom de Maher-Shalal-Hash-Baz est de bon augure. Sa première partie, Maher-Shahal, qui veut dire prompt butin, vise Damas dont les Assyriens s’empareront, et la seconde partie, Hash-Baz, qui signifie Proche pillage, est relative à Samarie.

          En un poème très personnel, Isaïe complètera l’enseignement que ses contemporains pouvaient trouver dans sa propre vie et dans la naissance de ses enfants.