Romains 12, 1-24

Offrir son corps

Saint Pierre Chrysologue

Homélie 108, Livre des Jours, p. 420s

 

          Ecoutons, frères, l’adjuration de l’apôtre Paul : Je vous adjure d’offrir vos corps. Par cette demande, Paul a fait accéder tous les hommes au sommet du sacerdoce : offrir vos corps comme un sacrifice vivant.

          Quelle fonction sans précédent que celle du sacerdoce chrétien ! L’homme y est à lui-même et la victime et le prêtre. L’homme n’a pas à chercher au dehors ce qu’il doit immoler à Dieu ; l’homme apporte avec lui et en lui ce qu’il doit offrir pour lui-même à Dieu en sacrifice. La victime demeure la même, le prêtre reste le même. La victime que l’on frappe reste vivante, et le prêtre ne meurt pas puisqu’il doit officier. Etonnant sacrifice où le corps est offert sans qu’il y ait de corps, où le sang est offert sans que le sang soit versé.

          Frères, ce sacrifice du Christ dépend du modèle qu’il nous en a donné, lorsqu’il a immolé son corps pour que sa vie donne la vie au monde. Et vraiment il a fait de son corps un sacrifice vivant, puisqu’il vit en étant immolé. Avec une telle victime, la mort est donnée en rançon, le sacrifice demeure, le sacrifice est vivant, la mort reçoit son châtiment. C’est pourquoi les martyrs naissent en mourant, commencent leur vie lorsqu’ils la finissent, vivent par leur mise à mort, et brillent dans le ciel alors que sur la terre on croyait à leur extinction.

          Je vous adjure, frères, par la miséricorde de Dieu, d’offrir vos corps en sacrifice vivant et saint. C’est ce que le prophète a chanté : Tu ne voulais ni sacrifice, ni oblation, mais tu m’as façonné un corps.

          Sois le sacrifice et le prêtre de Dieu. Ne néglige pas le don que t’a concédé la souveraineté divine. Revêts la robe de la sainteté, boucle sur toi le ceinturon de ta chasteté. Que le Christ vienne voiler ta tête, que la croix imprimée sur ton front te protège toujours, mets sur ton cœur le mystère de la science divine, fais brûler sans cesse l’encens de la prière, empoigne le glaive de l’Esprit, fais de ton cœur un autel. Et ainsi présente ton corps à Dieu, offre-le sans crainte en sacrifice.

          Dieu désire la foi, non la mort. Dieu a soif de prières, et non de sang. Dieu se laisse réconcilier par le bon vouloir, non par le meurtre.