1 Corinthiens 11, 2-16

« Le chef de tout homme, c’est le Christ »

Père Jacques Guillet

Jésus-Christ, l’homme véritable, Christus n° 43, 1964, p. 390s

 

          Le Père qui est tout pour son Fils est le Dieu qui aime les hommes, et qui les aime au point de livrer pour eux son Fils à la mort. En se faisant homme, en naissant de notre race, en s’abandonnant à nos réflexes d’hommes, le Seigneur ne se détache pas du Père, pour trouver dans notre humanité un pôle où s’attacher. Le seul pôle pour lui est le Père, mais, parce qu’il ne peut se détacher de ce pôle, il est attaché à nous d’un lien unique, éternel.

            Il est attaché à nous de toute son humanité, d’une humanité totale, intacte, illimitée, sensible à tout ce qui nous touche, ouvert à tout ce qui nous attire. Mais cet attachement indissoluble et universel qui fait le fond de sa nature d’homme est le fruit de son amour filial pour le Père, le fruit du Saint Esprit. Ce fruit ne peut périr, cette attachement ne peut se rompre. S’il ne dépendait que de son humanité, nous pourrions nous interroger sur sa solidité : quel est l’homme qui n’a jamais trahi son frère, porté atteinte à l’humanité ? En lui, en lui seul, jamais l’humanité n’a cédé. Ayant fait jusqu’au bout l’expérience de notre péché, il meurt en nous pardonnant, trouvant encore en nous de quoi nous aimer. Le seul secret de cet amour, de  cette fidélité absolue, c’est le Père : Je les ai aimés comme tu m’as aimé.

            On comprend pourquoi l’humanité ne peut être pour Jésus un but : il ne peut la voir qu’enveloppée de l’amour de son Père, partageant la joie des Trois Personnes. Le Christ aime l’humanité de l’amour dont il aime son Père, il ne peut servir son Père sans se faire le serviteur de tous les hommes. De l’amour pour son Père à l’amour des hommes, le passage est immédiat, et c’est au nom du Père qu’il se fait. Sa réponse à la question qu’on lui pose sur le plus grand commandement de la Loi est typique : Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute son âme et de tout son esprit ; voilà le plus grand et le premier commandement. Mais ajoute immédiatement Jésus, il y en a un second qui est semblable au premier, ni marginal, ni secondaire par rapport au premier, mais de même ampleur et de même urgence : Tu aimeras ton prochain comme toi-même.

            Voilà pourquoi la victoire du Christ ressuscité est la victoire de l’homme. Non seulement il est capable d’être auprès de chaque homme le compagnon de marche et de travail, l’ami toujours proche, mais il est devenu l’esprit vivifiant de l’humanité nouvelle. Jésus Christ construit l’humanité, il rassemble les générations, il fait l’homme, il est l’homme.