1 Pierre 2,1-17 ou Apocalypse 21,9-27

La chaire de l’évêque

Dom Henri Leclercq

DACL, tome 3-A, colonnes 19s

 

                Dans l’antiquité, la cathèdre avait le sens général de siège ; c’est là que s’asseyaient les rhéteurs et les philosophes durant leur enseignement, c’est là que siégeaient les sénateurs, c’est de là que le père de famille romain régissait sa famille. Les docteurs et évêques chrétiens l’adoptèrent très tôt : ils transportaient volontiers dans l’église leur siège familier, leur cathèdre, d’où ils avaient adressé leurs leçons dans l’école, et ainsi la cathèdre se trouva rapidement amenée à prendre une dignité liturgique. Elle fut le siège du fondateur de la plupart des églises ; avec elle se confondit le souvenir des origines, souvent obscures et obscurcies à dessein, des premiers apôtres et évêques d’une ville. La cathèdre localisa un tel souvenir. Ce terme de cathèdre fut délaissé et donna naissance au mot chaire.

                Le lieu où l’évêque posait sa cathèdre, sa chaire, prenait, aux yeux des fidèles, une dignité éminente, c’était désormais l’Eglise épiscopale, le siège officiel d’une chrétienté et l’édifice qui abritait la chaire n’existait, pour ainsi dire, qu’en fonction de cette chaire : on lui donna donc le titre de ecclesia cathedrae, la cathédrale.

                La chaire elle-même est un objet de vénération. Chaire et église épiscopales sont inséparables désormais. Au cours des siècles si troublés par les invasions de barbares ou de pirates, nous voyons souvent les évêques s’obstiner dans une cité, parce que leur chaire y est en quelque sorte attachée ; ce n’est qu’à la dernière extrémité qu’on se résout à transporter ailleurs ce siège qui a, pour ainsi dire, pris possession du sol et créé une unité ecclésiastique, le diocèse. Chaire prend ainsi le sens d’établissement, ce mot s’est imposé dans le monde latin pour désigner un meuble liturgique indispensable dans l’église mère du diocèse, la cathédrale.

                Au moment où l’évêque s’installait dans son église, il n’avait guère le choix de la place : situé au fond de l’abside, sa chaire, son siège, exposé aux regards de tous, de la simplicité des débuts fut de plus en plus décoré. Il ya lieu de penser que ce luxe ne commença qu’après la paix de l’Eglise, en 313. C’est de là que l’évêque préside la liturgique et enseigne son peuple.