Sur Jean 8, 1-11
Justice et miséricorde

Saint Augustin
Œuvres Complètes 9, Traité sur l’évangile de Jean, p. 607s

La Loi commandait de lapider les adultères ; or la Loi ne peut prescrire ce qui est injuste, et si quelqu’un allait à l’encontre d’un précepte de la Loi, cette personne était coupable d’injustice. Les pharisiens se dirent entre eux : ce Jésus passe pour un ami de la vérité, pour un homme qui respire la douceur ; cherchons à l’attaquer sur la justice. Présentons-lui une femme surprise en flagrant délit d’adultère et demandons-lui ce qu’ordonne la Loi à son sujet. Ces pharisiens ne cherchaient qu’à lui tendre un piège, qu’à l’embarrasser.
Dans sa réponse, le Seigneur reste fidèle à la justice, sans s’écarter de sa douceur habituelle. Quelle est sa réponse ? Que répond la vérité, que répond la sagesse, que répond la justice ? Il ne répond pas : « Qu’elle ne soit pas lapidée », il ne peut parler contre la Loi ; il se garde bien de dire : « Qu’elle soit lapidée », car il est venu pour chercher ce qui était perdu. Quelle est donc sa réponse ? Voyez comme elle respire la justice, la douceur, la vérité, la miséricorde : « Que celui d’entre vous qui est sans péché lui jette la première pierre ». Quelle réponse pleine de sagesse ! Jésus les fait entrer en eux-mêmes, les oblige à regarder au fond de leur propre cœur : quiconque s’observe attentivement se découvre pécheur. Cette réponse de Jésus, c’est la voix de la justice : frappés par cette justice comme par un fer de lance, les pharisiens rentrent en eux-mêmes, se découvrent pécheurs, et se retirent l’un après l’autre en commençant par les plus âgés. Leur départ est un aveu.
La femme reste donc seule, tous étant partis. Jésus lève les yeux sur elle : nous avons entendu la voix de la justice, voilà maintenant la voix de la douceur : « Femme, où sont-ils donc ? Personne ne t’a condamnée ? » Elle lui répond : « Personne, Seigneur ». « Moi non plus, dit Jésus, je ne te condamne pas ». Jésus favorise-t-il le crime ? Non assurément ; écoutons la suite : « Moi non plus, je ne te condamne pas : va, et désormais ne pèche plus ». Le Seigneur condamne le péché, il ne condamne pas l’être humain.
Ceux qui aiment dans le Seigneur sa douceur, qu’ils craignent la vérité, car il est à la fois doux et juste. Le Seigneur est plein de miséricorde et de compassion, sa miséricorde peut paraître excessive, craignez cependant sa vérité ; ceux dont il supporte maintenant les iniquités, il les jugera un jour.