Sur Marc 16, 15-20
Dieu au cœur de l’homme
Père Yves Raguin
La profondeur de Dieu, p. 167s

Le chemin vers Dieu passe par les profondeurs de notre existence. Le Christ a surgi d’un monde d’hommes. Il est venu parmi nous comme un homme, et il a fallu longtemps aux apôtres pour le reconnaître comme un maître venu du ciel, puis comme le Fils de Dieu. Quand, après sa mort, il se montre à eux sous différents visages, il leur fait comprendre que, tout en surgissant des profondeurs de ce monde, il vient d’un autre monde. Plus ils le voient surgir au plus intime d’eux-mêmes, plus ils le reconnaissent en même temps comme leur Seigneur. Plus il se montre intime à eux-mêmes, plus ils voient comment il les dépasse.
Il est toujours Jésus, l’ami et le maître des jours passés, mais peu à peu sa réalité divine s’exprime en séparation, en étrangeté, en distance. L’Ascension devient une nouvelle expression de la profondeur du mystère du Christ qui va reprendre la place qu’il avait auprès du Père. Transcendance et profondeur se rejoignent cependant. Durant toute sa vie, le Christ a cherché à faire saisir à ces disciples que, s’ils le connaissaient intimement, ils découvriraient en lui et en eux-mêmes la présence du Père qui est aux cieux. Maintenant qu’il va rejoindre ce Père et retrouver la gloire qu’il avait depuis toujours auprès de lui, il leur révèle au fond d’eux-mêmes la présence de la transcendance divine. Le Fils, en montant au plus haut des cieux, nous révèle l’infinité incompréhensible de Dieu ; l’Esprit, en venant au cœur des Apôtres, les ouvre à la présence divine au plus profond de leur être. C’est ainsi que l’Ascension nous découvre tout autant la profondeur de l’insertion de notre vie en Dieu que la distance entre l’humain et le divin. Et puis cette Ascension donne toute sa force à l’insertion du Christ dans la réalité créée. Des profondeurs de l’homme, il s’élève au plus haut des cieux. Si le Christ n’est qu’un homme comme les autres, il ne peut nous révéler le plus profond de nous-mêmes. Il ne connaît ni les profondeurs de Dieu, ni celles de l’homme. Notre vie alors est vaine, fermée pour toujours, sans profondeur, sans hauteur.
Avec le Christ, la profondeur de l’homme ouvre sur la profondeur divine. Il s’est fait homme pour cela. C’est pourquoi nous ne devons plus avoir peur des chemins intérieurs de notre humanité. Arrivés au plus intime, au point extrême, nous touchons à Dieu, à son Être infini. Et si nous acceptons de suivre le Christ, il nous découvrira Dieu au cœur de l’homme, et nous révélera le mystère de la vie divine. La plaie béante au cœur du Christ ouvre sur le cœur de tout homme, qu’il soit saint ou pécheur, mais, plus profondément sur le cœur de Dieu. Par-delà mon propre péché, par-delà mon repentir, je trouve l’amour de mon Dieu.