Sur Cantique des cantiques 2,8-14 . 8,6-7
Le Verbe, l’Eglise, l’âme

Origène
Commentaire sur le Cantique des cantiques, SC 376, p. 661s

L’explication spirituelle du texte du Cantique des cantiques n’est pas si laborieuse et difficile. L’âme, Epouse du Verbe, réside dans la maison royale, c’est-à-dire dans l’Eglise ; elle est informée par le Verbe de Dieu, son Epoux, de tout ce qui est entreposé et caché dans le palais royal et dans la chambre du Roi. Elle apprend que dans cette maison qui est l’Eglise du Dieu Vivant, il y aussi le cellier de ce vin qui fut recueilli des saints pressoirs : vin non seulement nouveau, mais encore vieux et doux, la doctrine de la Loi et des prophètes. Formée par ces vins, elle reçoit en elle le Verbe lui-même qui était au commencement Dieu auprès de Dieu.
Quand elle est visitée par le Verbe de Dieu, il vient à elle sautant à travers les montagnes, c’est-à-dire lui révélant les pensées élevées et sublimes de la science céleste, en sorte qu’il arrive jusqu’à l’édifice de l’Eglise, la maison du Dieu vivant, colonne et support de la vérité, et qu’il se tient à côté du mur ou derrière le mur pour n’être pas totalement caché, ni tout à fait visible. Car la Parole de Dieu n’est pas exposée en public et ouvertement, ni n’apparaît pour être foulée aux pieds, mais on la trouve au cours d’une recherche, et on la trouve, non pas exposée au grand jour, mais cachée comme à l’abri derrière un mur.
Or l’âme que l’on dit être dans l’Eglise n’est pas comprise comme établie dans des édifices circonscrits par des murs, mais placée à l’intérieur des remparts de la foi et des édifices de la sagesse, couverte de la toiture élevée de la charité. C’est donc l’intention bonne et la foi aux droites doctrines qui font qu’une âme réside dans la maison de l’Eglise.
Ainsi donc le mur ici est une certaine partie de cette maison qui peut indiquer la solidité des doctrines : on dit qu’au-dessous de ce mur se tient l’Epoux, et parmi les doctrines il est si grand, de si haute taille, qu’il domine tout l’édifice et observe l’Epouse, c’est-à-dire l’âme. Et certes il ne se manifeste pas encore à elle à découvert et en entier, mais pour ainsi dire l’observant par les treillis, il l’encourage et l’invite à ne pas rester oisive à l’intérieur de la maison, mais à sortir au-dehors à sa rencontre, et à s’efforcer de le voir, non plus par les fenêtres et les filets, ni dans un miroir en énigme, mais en avançant au-dehors, de le voir face à face. Car pour l’instant, parce qu’elle ne peut encore le contempler de cette manière, l’Epoux se tient non pas en avant du mur, mais en arrière d’elle, derrière le mur. Or, il se penche par les fenêtres, qui sans nul doute étaient ouvertes pour recevoir la lumière et illuminer la maison. En se penchant et en observant par elles, le Verbe de Dieu invite l’âme à se lever et à venir à Lui.