Sur Luc 7, 11-17
Résurrection à Naïm

Saint Ambroise
Traité de l’évangile de saint Luc, SC 45, p. 214s

L’évangile qui relate la résurrection du fils unique de la veuve de Naïm est riche d’un double profit : nous croyons que la divine miséricorde est vite fléchie par les lamentations d’une mère veuve, surtout quand elle est brisée par la souffrance et par la mort d’un fils unique, veuve à qui cependant la foule en deuil restitue les avantages de la maternité ; d’autre part, cette veuve entourée par la foule nous semble plus qu’une femme : elle a mérité d’obtenir par ses larmes la résurrection de l’adolescent, son fils unique. C’est que la sainte Eglise rappelle à la vie, du cortège funèbre et des extrémités du tombeau, le peuple plus jeune, eu égard à ses larmes ; et il lui est interdit de pleurer celui à qui est réservé la résurrection.
Or, ce mort était porté au tombeau, dans un cercueil, par les quatre éléments de la matière ; mais il avait l’espérance de la résurrection puisqu’il était porté sur le bois ; celui-ci, il est vrai, ne nous a pas servi tout d’abord, mais, une fois que Jésus l’eut touché, il commença à nous procurer la vie : c’était un signe que le salut se répandrait sur le peuple par le gibet de la Croix. Ayant donc entendu la Parole de Dieu, les lugubres porteurs de ce deuil s’arrêtèrent, alors qu’ils entraînaient le corps humain dans le courant mortel de sa nature matérielle.
Mais bien que les derniers symptômes de la mort aient fait disparaître tout espoir de vie, et que les corps des trépassés gisent auprès du tombeau, pourtant, à la Parole de Dieu, les cadavres prêts à périr se relèvent, la parole revient, le fils est rendu à sa mère, rappelé du tombeau, arraché au sépulcre. Quel est ce tombeau, le vôtre ? Votre tombeau est le manque de foi, votre sépulcre est cette gorge (leur gorge est un sépulcre béant, dit le psaume 5) qui profère des paroles de mort. C’est le sépulcre dont le Christ vous délivre ; de ce tombeau, vous ressusciterez si vous écoutez la Parole de Dieu. Notre mère l’Eglise compatit, par une souffrance spirituelle qui lui est naturelle, lorsqu’elle voit ses enfants poussé vers la mort par des vices funestes. Nous sommes les entrailles de ses entrailles, car il existe aussi des entrailles spirituelles : Paul les avait, lui qui disait : Oui, frère, donne-moi cette joie dans le Seigneur : rassasie mes entrailles dans le Christ. Nous sommes donc les entrailles de l’Eglise, parce que nous sommes membres de son corps, faits de sa chair et de ses os. Qu’elle pleure donc la tendre mère, et que la foule l’assiste. Alors, vous vous relèverez de la mort, alors vous serez délivrez du sépulcre, les ministres de la mort s’arrêteront, vous vous mettrez à dire des paroles de vie. Tous craindront et loueront Dieu de nous avoir accordé de tels remèdes pour éviter la mort.