Sur Job 4, 1-21
Une révélation divine

Walter Vogels
Job, l’homme qui a bien parlé de Dieu, p. 85s

Comme Eliphaz adresse la parole à Job, et Job a adressé la parole aux autres, ainsi une parole est venue à Eliphaz lui-même. Ce qu’Eliphaz a dit dans la première partie de son discours (v. 1-11) était fondé sur son expérience, comme il convient à un bon sage. D’une façon inattendue, il se réfère maintenant (v. 12-21) à une révélation privée. De sage, il devient prophète. Les prophètes, en effet, affirment que la parole de Dieu vient vers eux (v. 12), ils ont des visions (v. 13), et ils entendent des voix (v. 16). Eliphaz a eu cette révélation dans un sommeil profond. Job avait supplié pour qu’il n’y eut que nuit et ténèbres (v. 3-10) ; Eliphaz considère que la nuit porte clarté, elle est une période de révélation (v. 13). La vision a atteint Eliphaz dans ses os et dans sa chair (v. 14-15), comme Job a été frappé dans ses os et dans sa chair (2,4-5). Ici aussi Dieu se manifeste par son souffle (ruah) mystérieux ; son souffle, vent (orage), esprit (v. 15). La vision combine ainsi orage et silence, comme pour Elie (1 R 19,12). Elle est le reflet de la vie de Job dans laquelle il y a de l’orage, mais qui peut se calmer. Il y avait une image, un spectre, mais dont Eliphaz n’a pas reconnu le visage devant ses yeux (v. 16). Il y a eu contact entre les deux mondes : entre le ciel et la terre. Il deviendra peut-être possible pour Job aussi de rencontrer Dieu, et alors il aura la chance, s’il le veut, de maudire Dieu.
Eliphaz a proposé dans la première partie de son discours la doctrine traditionnelle de l’ordre : une bonne vie mène au bonheur. La vie de Job semble contredire cette théorie : une bonne vie mène au malheur. On est en présence du chaos. La révélation divine donne une autre perception du problème : est-ce qu’un être humain peut être parfait (v. 17) ? La réponse à cette question rhétorique est évidente et n’a nullement besoin d’une révélation particulière. Eliphaz suggère peut-être ainsi que certaines vérités exigent plus que la sagesse pour en saisir la signification profonde. Même les êtres célestes ne sont pas parfaits (v. 18). Le texte les appelle aussi serviteurs, ce qui est le titre d’honneur que Dieu a donné à Job : As-tu remarqué mon serviteur Job ? Si les êtres célestes ne sont pas parfaits, alors il n’en est pas question pour l’être humain tiré de la poussière et destiné à retourner à cette poussière. L’être humain est si fragile ! Job, assis sur le dépotoir doit en être bien conscient. L’être humain est comme une teigne qui ne vit qu’un jour. Tout arrive si vite que l’être humain meurt dénué de sagesse. L’être humain ne comprend jamais totalement le sens de la vie, ni de la mort. Il ne peut rien y changer. Il n’y a pas beaucoup de différences entre l’être humain et l’animal. Eliphaz utilise le mot sagesse : de prophète il devient maître de sagesse.