Sur Job 11, 1-20
La repentance débouchera sur une vie radieuse

Georgette Chéreau
Job et le mystère de Dieu, un chemin d’espérance, p. 85s

Au regard de Sophar, la plainte de Job n’est qu’un vain bavardage auquel il importe de répliquer, car elle est une offense à Dieu. Il le fait de manière cinglante par une série de questions rhétoriques en dénonçant les prétentions de Job à la Sagesse. Puis Sophar reprend des thèmes hymniques dans le but de confondre Job. La majesté de Dieu est inaccessible à l’esprit humain ; aucun lieu de l’univers (terre, mer, ciel sous-sol) ne peut la contenir, aucune de nos mesures ne peut la cerner. Est-ce que le ciel et la terre, je ne les remplis pas ? Ces paroles du Seigneur (Ps 139 et Jr 23) rappellent que rien ne peut échapper au regard de Dieu. Saint Paul se souviendra de cette évocation cosmique pour évoquer l’immensité de l’amour du Christ qui surpasse toute connaissance.
Sophar a hâte de faire la leçon à Job. Il y vient en citant un proverbe à la manière de Jérémie (13,23) qui disait : Un éthiopien peut-il changer sa peau, et un léopard ses taches ? Pour Sophar, il est aussi impossible à un sot de devenir sage qu’à l’onagre (l’âne sauvage) ! Or, c’est être sans intelligence que de ne pas remettre son sort à Dieu.
L’évocation de la grandeur de Dieu sert seulement ici d’aliment dans la controverse avec Job. Curieuse attitude toutefois que de rappeler les limites de l’intelligence humaine en se mettant soi-même à la place de Dieu pour estimer que la peine infligée à Job n’est pas encore à la mesure de son iniquité ! Sermonner d’un air supérieur a-t-il jamais aidé au repentir ? Qui est Sophar pour croire qu’il a percé les secrets des desseins de Dieu ? Se comporter ainsi, n’est-ce pas là plutôt manière de se défendre de ses propres peurs plutôt que d’écouter la plainte de l’autre ? N’est-ce pas prendre la place du juge plutôt que de reconnaître un frère en celui qui souffre ?
Sophar, qui vient d’interpeller Job rudement, l’invite à changer de cap : il interprète la souffrance de son ami comme un châtiment de Dieu et ne voit d’autre issue que la reconnaissance de sa faute. Alors Dieu rendra à Job ses bienfaits. Donner des leçons est facile…
La douleur peut être l’occasion d’une révolte dévastatrice, d’une résignation peureuse, ou encore d’une purification et d’un renouveau de la foi, allant de pair avec le dur combat dans l’obscurité du silence de Dieu. Sans doute notre liberté est exacerbée dans l’épreuve, mais elle demeure effective en ce carrefour où nous sommes invités à choisir entre l’isolement ou la confiance.