Job 7, 1-21
Montons à la montagne de Dieu (Isaïe 2,3)
Sœur Marie-Jacqueline, carmélite
Seuls la Gloire et l’honneur de Dieu y habitent, Carmel, 1978, n° 4, p. 119s

La montagne dont parle Jean de la Croix est assurément la montagne du Carmel puisque, sur la célèbre esquisse, nous lisons Terre du Carmel, représentant pour lui le pays plantureux dont parle Jérémie (2,7) pour vous rassasier de ses fruits et de ses biens. Mais n’est-elle que cela ? Lorsque le Saint cherche à expliquer le chemin spirituel, il se réfère à plusieurs reprises au Sinaï-Horeb ainsi qu’au Mont Bethel. Il s’agirait donc pour lui, en fait, de la montagne de Dieu, là où Dieu se révèle à ses amis, dans des manifestations variées où il leur dit un peu de son Etre inépuisable, et de ses insondables desseins d’amour, de cette montagne de Dieu où il s’est révélé aux prophètes de son peuple choisi, Moïse et Elie.
Si les théophanies de l’Ancien Testament se passent toujours sur le sommet d’une montagne, ce n’est pas sans nous transmettre un mystère profond que Jean de la Croix s’est appliqué à pénétrer. Il y a vu d’abord l’expression de cette montée vers Dieu que nous avons tous à accomplir d’une façon ou d’une autre, si nous voulons atteindre Jérusalem qui, par son nom même vision de paix, signifie l’Eglise triomphante.
Cette montée se réfère à l’ascension du Sinaï entreprise par Moïse sur l’ordre de Dieu pour communiquer avec Dieu et recevoir lumière pour guider le peuple. Elle se réfère à la longue marche d’Elie pour atteindre le sommet de l’Horeb, la montagne de Dieu. Elle se réfère aussi, implicitement à la montée vers Jérusalem que tout juif pieux entreprenait régulièrement pour célébrer, dans la Fête, son Alliance avec Dieu et retrouver dans son Temple Celui qui habite la montagne de Sion.
L’Ancien Testament nous révèle encore autre chose : si la montagne est le lieu privilégié de la manifestation de Dieu, si elle est le lieu saint qui porte le Temple où Dieu demeure, son nom même, parfois, recouvre celui de Dieu. Jean de la Croix nous dira : Le Verbe divin est signifié par la montagne en tant qu’Il est la très haute Sagesse essentielle de Dieu. Dès lors se présente à nous une interprétation : si Dieu ne se manifeste que sur la montagne, celle-ci n’est-elle pas le symbole caché et mystérieux du Verbe incarné par qui seul nous pouvons approcher Dieu ? Est-ce sans motif que le Saint du Carmel emploie l’expression : monter en cette montagne ? N’est-ce pas plutôt pour nous faire intuitivement comprendre que c’est dans le Christ que se fait cette montée ? Une fois le sommet atteint, ce sera encore dans les cavernes de la pierre, comme Moïse au Sinaï, comme Elie à l’Horeb, c’est-à-dire dans les profondeurs des mystères du Christ qu’il faudra demeurer pour que Dieu puisse nous communiquer sa très haute et savoureuse Sagesse.