sur Jean 12, 24-26
La parabole du grain qui meurt
Père Valerio Mannucci
Les païens à l’heure de la glorification de Jésus, AS 18, p. 39-40

Les thèmes et les termes de l’évangile de ce jour nous rappellent les logia traditionnels de Jésus qui figurent déjà dans les synoptiques, mais se sont insérés de manière originale et neuve dans la tradition johannique.
Le sens général de cette parabole est clair : le grain désigne Jésus qui, en passant par la mort, portera un fruit abondant, c’est-à-dire deviendra capable de communiquer la vie à tous les hommes. Il ne s’agit pas d’inviter les croyants à se mortifier pour acquérir des mérites ; nous sommes en présence d’une affirmation d’ordre christologique.
Parme les diverses paraboles synoptiques de la semence auxquelles peut d’un certaine manière renvoyer celle de Jean, il faut accorder une mention particulière au grain de sénevé qui devient la plus grande de toutes les plantes potagères… au point que les oiseaux du ciel peuvent s’abriter sous son ombre. L’image semble inspirée par celle du songe de Daniel (4,7-9). Même l’expression beaucoup de fruits se retrouve telle quelle en Daniel (4,9). Nous avons deux paraboles sur la fécondité de la semence pour symboliser le retour des païens à Dieu.
La semence du verset 25, tant pour la forme que pour le fond, vient des synoptiques. Jean y ajoute toutefois une nuance à lui, en mentionnant la vie éternelle, celle que le croyant reçoit d’en-haut. Dans le contexte du IV° évangile, le sens du verset ne fait pas de doute : de même que pour le Christ le chemin de la glorification passe par la mort, ainsi en va-t-il pour ses disciples de tous les temps.
Le verset 26 a aussi son parallèle chez Marc : Si quelqu’un veut venir à ma suite, qu’il se renie lui-même, qu’il se charge de sa croix, et qu’il me suive (8,34). La tradition synoptique et celle de Jean nous ont, l’une et l’autre, conservé ces deux paraboles du Seigneur ; présentées dans l’ordre inverse, elles signifient la même chose : invités à suivre Jésus, nous sommes aussi invités à l’imiter dans la souffrance et dans la mort. Toutefois, on ne doit pas oublier que chez Jean ces paroles font encore partie de la réponse adressée aux païens qui veulent voir Jésus.
Ils demandent accès auprès du Christ historique, et c’est le chemin vers le Ressuscité qu’on leur indique. Car le Ressuscité n’est pas directement accessible, sinon en de courts instants de contemplation qui interrompent l’existence historique de l’homme. Mais le chemin qui conduit vers lui est celui du service qui peut aller jusqu’à l’acceptation de la mort. C’est au fond une décision de ce genre qui est sous-jacente à l’option de la foi devant la Parole et à la Présence du Christ. Et c’est la détermination du Christ au moment de son heure, qui rend possible, dans la foi, une détermination analogue de la part de l’homme.