sur Luc 5, 1-11
La pêche miraculeuse
Saint Grégoire le Grand
Homélies sur l’Evangile, SC 522, homélie XXIV, p. 91s

Les disciples avaient eu une pêche très difficile, c’était pour qu’à la venue du Maître leur admiration soit extrême. Il leur dit aussitôt : Jetez le filet à droite et vous trouverez. Deux fois, dans le saint Evangile, il est dit que le Seigneur ordonna de jeter le filet pour la pêche : une fois avant sa passion et une fois après sa résurrection. Avant de souffrir et de ressusciter, notre Rédempteur donne l’ordre de jeter le filet, mais il ne dit pas s’il faut le jeter à droite ou à gauche ; par conséquent, apparaissant à ses disciples après sa résurrection, il donne l’ordre de jeter le filet à droite. Dans la première pêche, ils prirent tant de poissons que les filets se rompirent ; dans celle-ci, beaucoup de poissons sont pris, mais sans que les filets se rompent. Que ne sait que la droite désigne les bons, et la gauche les méchants ? Aussi la pêche où il n’est pas indiqué de quel côté jeter le filet désigne-t-elle l’Eglise actuelle, qui rassemblent à la fois les bons et les méchants, sans choisir ceux qu’elle ramène puisqu’elle ignore que choisir. Lors de la pêche qui a lieu après la résurrection du Seigneur, le filet est lancé à droite seulement, car seul l’Eglise des élus arrive à voir la splendeur de sa gloire, elle n’aura rien ne commun avec ce qui se passe à gauche. Dans la première pêche, le filet se rompt à cause de la multitude des poissons, car, actuellement, tant de réprouvés entrent dans l’Eglise pour confesser leur foi qu’ils déchirent l’Eglise avec leurs hérésies. Dans la deuxième pêche, au contraire, on prend beaucoup de grands poissons sans que le filet se rompe, car la sainte Eglise des élus, reposant dans la paix continuelle de son fondateur, n’est plus déchirée par aucune dissension.
Après avoir pris tant de gros poissons, Simon Pierre monta dans la barque et tira le filet à terre. Votre charité a remarqué, je pense, pourquoi c’est Pierre qui ramène le filet à terre. C’est à lui qu’a été confiée la sainte Eglise, à lui que s’adressent ces paroles particulières : Simon, fils de Jean, m’aimes-tu ? Sois le pasteur de mes brebis. Ce qui est dévoilé ensuite par une parole, est signifié maintenant par un acte. Comme le prédicateur de l’Eglise nous enlève aux flots de ce monde, il faut que Pierre amène à terre le filet rempli de poissons. Il tire lui-même les poissons sur le ferme rivage, car, par la sainte prédication, il montre aux fidèles la stabilité de la patrie éternelle. Cela, il l’a fait par ses paroles, il l’a fait par ses lettres, et il le fait chaque jour par les signes de ses miracles. Chaque fois que nous nous tournons grâce à lui vers l’amour du repos éternel, chaque fois que nous sommes séparés du tumulte des affaires terrestres, ne sommes-nous pas ramenés au rivage, tels des poissons pris dans le filet de la foi ?