Sur Tobie 3,7-17
Le Christianisme en Corée
Jacques Gadille et Jean-François Zorn
Histoire du Christianisme de Jean-Marie Mayeur, tome 11, p. 1082s

Fondée par des laïcs, dans le contexte d’une crise culturelle et politique, l’Eglise catholique de Corée vivait, à la fin du XVIII° siècle, sous le signe des persécutions. Grégoire XVI y créa, en 1831, un vicariat apostolique pour y encadrer quelque six mille chrétiens répartis en une centaine de village. Nommé en 1835, Laurent Imbert, des Missions Etrangères de Paris, s’était préparé par l’étude de la langue et de l’histoire du pays, avant de tomber victime de la persécution en 1839. Il avait pu envoyer trois jeunes coréens se former à la prêtrise à Macao, et l’un d’eux, André Kim Kum-Hai, avec l’aide de l’évêque de Mandchourie, Mgr Ferréol, réussit, après des années d’attente à la frontière, à pénétrer à Séoul en 1845, à recevoir l’ordination à Shanghai, pour revenir quelques mois seulement, accompagné de quelques missionnaires. Arrêté, il réussit à gagner ses juges et la cour, à la faveur de ses connaissances en géographie notamment, mais son exécution fut précipitée par la démonstration navale du contre-amiral Cécile, chargé d’obtenir réparation de la mort du premier vicaire apostolique.
Une période d’accalmie, au milieu du siècle, permit de créer en 1856 un premier séminaire et de diffuser nombre d’ouvrages religieux imprimés en caractères chinois. En 1863, on comptait vingt-trois mille chrétiens, dont la moitié périt en 1866 après une violente reprise de la persécution. Celle-ci se renouvela en faisant deux mille victimes dix ans après, ponctuée par l’intervention navale de l’amiral Roze. Ce n’est qu’en 1881-1882 que la liberté religieuse fut garantie, sous la pression des Etats-Unis d’Amérique et du Japon.
Le vicaire apostolique, assisté par les sœurs de Saint-Paul de Chartres, avait pour sa part repris la tradition de former des prêtres locaux, en reconstituant le séminaire à Séoul ; la diffusion de livres chrétiens était favorisée par l’invention de caractères d’imprimerie coréens par le Père Eugène Coste. Les religieuses créèrent un réseau d’écoles primaires, et un grand hôpital à Séoul. Il y avait, au début du XX° siècle, une cinquantaine de religieuses coréennes. En 1911, on dénombrait 75 500 catholiques répartis principalement entre Séoul et Taigu, où fut alors créé un second vicariat s’étendant sur les régions les plus méridionales. Le vicaire apostolique de Séoul, Charles-Marie Mutel, fit alors appel aux bénédictins de Saint-Ottilien, qui installèrent une abbaye à Séoul. Depuis 1906, la domination du Japon sur la Corée se traduisait par un contrôle strict sur la vie économique, politique et religieuse, et si le clergé s’abstint prendre position, de nombreux chrétiens, membres de l’opposition, commencèrent à considérer que le christianisme pouvait constituer un refuge pour sauvegarder la personnalité politique et culturelle de leur pays.