Sur Luc 17, 11-19

Heureux celui qui sait remercier

 

Saint Bernard

Sermons divers, SC 518, sermon 27, p. 93s

 

Hélas ! Il ne se trouve que cet étranger pour revenir et rendre grâce à Dieu ! Les dix n’ont-ils pas été guéris ? Et les neuf autres, où sont-ils ? N’avaient-ils pas tous les dix supplié : Jésus, Maître, prends pitié de nous. Ce qui leur a manqué, c’est l’action de grâce puisqu’ils ne sont pas revenus et n’ont pas rendu grâce à Dieu.

Aujourd’hui encore, nous voyons beaucoup de personnes qui savent demander, et demander avec insistance ce dont ils éprouvent le besoin, mais nous en connaissons peu qui savent de montrer reconnaissants pour les bienfaits reçus. Il n’y a aucun mal à demander avec insistance, mais l’effet de la demande est annulé parce que Dieu nous trouve ingrats !

Heureux ce samaritain. Il a pris conscience qu’il ne possédait rien qu’il n’ait reçu de Dieu ; c’est pourquoi il a gardé le dépôt de la foi, et dans l’action de grâce il est revenu vers le Seigneur. Heureux celui qui, pour chaque don de la grâce, revient vers Celui en qui se trouve la plénitude de toutes grâces ; car si nous nous montrons reconnaissants à l’égard du Seigneur pour tout ce que nous avons reçu de Lui, nous préparons en nous un espace pour la grâce, et méritons de recevoir ainsi des dons plus abondants encore. La seule chose qui nous empêche de progresser dans la vie spirituelle, c’est notre ingratitude ; car le Donateur, considérant en quelque sorte comme perdu ce qu’un ingrat a reçu, se tient sur ses gardes : il sait que plus il donnerait à un ingrat, plus il dépenserait en pure perte.

Heureux donc celui qui se considère comme un étranger. Même pour les plus petits bienfaits il rend de grandes actions de grâce, car il ne doute pas et n’ignore pas que ce qu’on donne à un étranger, à un inconnu, est un don vraiment gratuit. Heureux donc celui qui remercie du fond du cœur, même pour les moindres bienfaits, dans la pensée que tout ce qu’il reçoit est un don purement gratuit.