Sur Isaïe 7, 1-17
Nous accueillons le signe dans les profondeurs et les hauteurs
Saint Guerric d’Igny
Sermon 3 pour l’Annonciation, 2-4

Le Seigneur s’adressa à Acaz : « Demande pour toi un signe ». Acaz répondit : « Non, je n’en demanderai pas, je ne mettrai pas le Seigneur à l’épreuve ». Oh ! Scrupule sacrilège ! Détestable piété ! Fausse humilité ! Tu prétends ne pas mettre le Seigneur à l’épreuve, mais tu méprises le Seigneur ! Serait-ce, en effet, le mettre à l’épreuve que de lui obéir avec foi ? N’est-ce pas, au contraire, le mettre à l’épreuve plus gravement que de provoquer sa colère par un évident mépris ?
Et bien, ce signe refusé, soit dans les profondeurs de l’enfer, soit dans les hauteurs des cieux, nous l’accueillons, nous, avec une foi entière et un respect plein d’amour. Nous reconnaissons que le Fils conçu par la Vierge est pour nous, dans les profondeurs de l’enfer, signe de pardon et de liberté ; qu’il est pour nous, dans les hauteurs des cieux, signe et espérance et de gloire. Car celui qui est d’abord descendu dans les régions inférieures de la terre (Ephésiens 4,9), pour retirer les captifs de la fosse sans eau par le sang de l’Alliance (Zacharie 9,11), c’est aussi celui qui est monté au plus haut des cieux pour remplir tout l’univers (Ephésiens 4,10).
Ce signe, désormais, le Seigneur l’a élevé d’abord sur le gibet de la croix, puis sur son trône royal. Il l’a élevé très haut, étendard pour les nations païennes (Isaïe 11,10), puisqu’il avait été contesté par le peuple juif (Romains 10,21). Et chaque jour, des quatre vents de la terre, il rassemble (Matthieu 24,31) autour de cet étendard les disciples qui forment l’Israël véritable.
Oui, c’est un signe pour nous que cette Mère vierge qui conçoit et enfante : signe qu’il est Dieu, cet homme conçu et enfanté. Ce Fils, qui accomplit des œuvres divines et endure des souffrances humaines, est pour nous le signe qu’il mènera jusqu’à Dieu ces hommes pour lesquels il est conçu et enfanté, pour lesquels il souffre.
Et de toutes les infirmités et disgrâces humaines que ce Dieu a daigné endurer pour nous, la première dans le temps, comme la plus grande dans l’abaissement, je le crois, fut sans doute que cette Majesté infinie ait supporté d’être conçue dans le sein d’une femme et d’y être enfermé pendant neuf mois. Dans ce sein, il est comme il n’était pas : sa Toute-Puissance est inopérante, comme si elle ne pouvait rien. Là, le Verbe éternel s’enfouit sous le silence.