Sur Isaïe 44, 1-23 / Luc 1, 67-79
« Il parlait et louait Dieu »

Karl Barth
Avent, p. 85s

Chaque fois que naît un homme de Dieu, Isaac, Samson, Samuel et bien d’autres, il se passe toujours quelque chose de mystérieux, d’inattendu, de surprenant, quelque chose de l’infinie richesse de la bonté de Dieu. Ce que nous devons découvrir, c’est que Dieu a agi.
Zacharie demanda des tablettes et écrivit : Jean est son nom. L’acte de Zacharie est un simple acte d’obéissance : il se souvient de ce qui lui a été dit, et il le fait ; il ne fait rien d’autre que d’écrire sur des tablettes, chose très simple, et cette très simple chose est l’obéissance. Si l’on n’obéit pas vraiment, on devient muet et l’on n’a rien à dire. Dès l’instant où l’incrédulité est ôtée, la bouche s’ouvre : Zacharie peut de nouveau parler. Et il parlait et louait Dieu : ce n’est pas pour de vaines paroles que sa langue a été déliée, c’est pour louer le Seigneur.
Dans ce chant de louange, il n’est parlé de Jean que par voie d’allusion, sauf dans un verset. Avant et après, et au centre de tout, il n’est question que de l’Autre, dont ce petit enfant, Jean, doit être le témoin. La lumière qui rayonne d’un témoin de Jésus-Christ ne peut être qu’une lumière reçue, prêtée, dérivée de la lumière absolue et originelle. Tout ce qu’il y a à dire des prophètes, des messagers de l’Evangile, des personnalités chrétiennes, des Pères de l’Eglise, ne saurait avoir de sens que dans la perspective du cantique de Zacharie, c’est-à-dire à condition que l’homme reste le petit enfant qui ne mérite en lui-même aucune mention spéciale. L’important, ce n’est pas le petit enfant, c’est ce qu’il annoncera. Il n’est qu’un prophète, c’est-à-dire quelqu’un par qui un autre s’exprimera. A lui, rien n’est laissé, sinon la reconnaissance et la prière aux pieds de celui qui l’a mis à sa place.
Pour expliquer Jean, il faut penser à Jésus-Christ lui-même ; il faut comprendre que Jésus-Christ est ici annoncé. La présence de Jésus-Christ n’est pas un événement nouveau : c’est l’ancienne présence qui a toujours été et qui est maintenant définitivement manifestée, c’est la Présence, dressée pour le passé et pour l’avenir, au centre du temps. Jean témoigne de lui comme les prophètes l’ont fait.
Il nous arrache aux mains de tous nos ennemis, clame Zacharie, car il voit le peuple de Dieu, il voit l’Eglise sous bien des menaces : l’incrédulité, la superstition, les hérésies où le diable sème sa semence à la Parole de Dieu. Dieu se charge de nous dans ces périls, comme dans celui de manquer de confiance en Dieu comme dans celui de n’avoir aucun courage. Dieu nous prend en charge, Jésus est notre Sauveur, notre Libérateur. Cela est aussi pour nous une exigence : il nous demande, en contrepartie, de le servir toute notre vie dans la sainteté et dans la justice.