Sur Romains 14, 1-23

Accueil mutuel

Pierre Prigent

L’épître aux Romains, p. 166s

 

La question centrale du développement de ce chapitre 14 de la lettre aux Romains écrite par Paul, les viandes sacrifiées aux idoles ou idolothytes, nous est bien étrangère. On aurait cependant tort de l’écarter en raison de son caractère exotique. Dès que l’on creuse sous la surface des mots, on s’aperçoit qu’il s’agit en fait d’une problématique qui nous est familière : que faire lorsque les chrétiens se divisent sur le point de savoir comment il faut vivre sa foi chrétienne dans le monde contemporain ?

On s’est déchiré à Corinthe sur ce sujet dans les années 50, et, pour finir, l’apôtre Paul a dû longuement intervenir dans l’aigre débat : dans le chapitre 8 de la première lettre aux Corinthiens, on découvre à la fois la profondeur du différent et les difficultés de Paul à savoir se faire entendre des deux parties. Il en va de même à Rome.

Alors l’apôtre remonte à la racine même du problème : Dieu. Et Dieu est Amour. L’Evangile est d’abord un message d’amour. Avoir une religion largement ouverte à l’intelligence, c’est bien. Découvrir toutes les dimensions de notre libération, c’est parfait. Mais cela ne peut justifier jugement, condescendance ou mépris.

Paul s’adresse surtout à ces chrétiens assurés dans leur foi, et il leur rappelle que, plus ils sont certains d’avoir raison et d’être des croyants éclairés, plus ils doivent aimer l’autre et admettre celui qui est différent et qui leur semble faible. Car, être chrétien n’est pas premièrement une question de certitudes intellectuelles. C’est d’abord une question d’amour. Au-dessus du savoir, il y a l’amour.

Peut-être Paul a été entendu à Corinthe : en effet, il ne revient pas sur le sujet dans sa deuxième lettre aux Corinthiens. Mais il consacre un long développement au même problème dans l’épître aux Romains, les chapitres 14 et 15. L’essentiel de son argumentation reste identique, mais le texte présente bien des originalités intéressantes. A-t-il été entendu à Rome ?