Sur Deutéronome 7,6-14 . 8,1-6
De la servitude au désert

Origène
Homélie sur l’Exode, SC 321, Homélie VIII, p. 241

Moi, je suis le Seigneur ton Dieu qui t’ai fait sortir de la terre d’Egypte. Cette parole ne s’adresse pas seulement à ceux qui sont partis d’Egypte, mais bien plus à toi qui l’entends aujourd’hui, si toutefois tu sors d’Egypte, si tu n’es plus esclave des Egyptiens. Vois si les affaires du siècle et les actions de la chair ne seraient-elles pas la maison de servitude, l’Egypte, et si, par contre, la fuite des choses du siècle et la vie selon Dieu ne seraient-elles pas la maison de liberté, comme dit le Seigneur dans les Evangiles : Si vous demeurez dans ma parole, vous connaîtrez la vérité, et la vérité vous rendra libres.
L’Egypte est donc la maison de servitude, Jérusalem et la Judée, la maison de liberté. Ecoute l’Apôtre déclarer à ce propos, avec la sagesse qui lui avait été donnée pour son ministère : La Jérusalem d’en-haut est libre, c’est notre mère à tous. Par contre, l’Egypte, cette province terrestre, est dite maison de servitude pour les fils d’Israël, en regard de Jérusalem et de la Judée qui deviennent pour eux maison de liberté ; de même, en regard de la céleste Jérusalem qui est, pour ainsi dire, mère de la liberté, le monde entier, avec tout ce qu’il contient, est une maison de servitude. En châtiment du péché, il y avait eu autrefois passage du paradis de liberté à la servitude de ce monde ; c’est pour cette raison que la première phrase du Décalogue, première parole des commandements de Dieu, porte sur la liberté : Moi, je suis le Seigneur ton Dieu qui t’ai fait sortir de la terre d’Egypte, de la maison de servitude.
Tant que tu étais fixé en Egypte, cette parole tu ne pouvais l’entendre, même à l’injonction de célébrer la Pâque, même ceinture aux reins et sandale aux pieds, même bâton à la main et mangeant des azymes avec des herbes amères. Que fis-je, fixé en Egypte, tu ne pouvais l’entendre ? Mais même parti de là, dès la première étape, tu n’as pas pu l’entendre, ni à la seconde, ni à la troisième, ni quand tu traversais la Mer Rouge. Même parvenu à Mara où l’amertume pour toi fut changée en douceur, même parvenu à Elim aux douze sources et aux soixante-dix palmiers, même ayant dépassé Réphidim, tu n’es pas encore jugé capable d’entendre ces paroles : tu ne le fus seulement qu’en arrivant au Mont Sinaï. Après avoir accompli bien des travaux, surmonté bien des épreuves et des tentations, à peine mériteras-tu de recevoir les préceptes de liberté et d’entendre ces mots du Seigneur : Moi, je suis le Seigneur ton Dieu, qui t’ai fait sortir de la terre d’Egypte, de la maison de servitude.