Jean 12, 24-26

« Si le grain de blé ne meurt… »

Saint Jean Chrysostome

Homélies sur saint Jean, OC 14, p. 203s

              Quels prétextes pourront alléguer les hommes qui ne croient pas à la résurrection, puisque nous avons, sous nos yeux, dans les plantes, dans les semences, en nous-mêmes, l’exemple d’une résurrection véritable ? Il faut que la semence commence par se corrompre pour qu’il y ait naissance. Vous n’entendez donc pas l’apôtre s’écrier : Il faut que ce corps corruptible revête l’immortalité. Il ne s’agit pas de l’âme, remarquez-le bien ; car l’âme est sujette à la corruption ; il s’agit de la substance qui en nous est morte, à savoir du corps, qui seul par la mort a été couché dans la tombe. Au demeurant, pourquoi voulez-vous qu’il n’y ait point pour les corps de résurrection ? Est-elle au-dessus de la puissance divine ? Mais il y aurait de la folie à le soutenir ! Serait-elle hors de toute convenance ? Mais comment y aurait-il inconvenance à ce que la substance corruptible qui a partagé les épreuves de l’âme, partageât après la mort ses couronnes ? S’il y avait inconvenance réelle, le Christ ressuscité n’eût point repris sa chair. Qu’il l’ait reprise et rendue à la vie, vous ne sauriez en douter après ces paroles : Mettez ici vos doigts et sachez qu’un esprit n’a ni os, ni corps. Pourquoi aurait-il ressuscité Lazare, si la vie future devait être étrangère à notre corps ? Pourquoi cette résurrection a-t-elle pris place parmi ses miracles et ses bienfaits ? Pourquoi a-t-il donné lui-même à manger ? Non, mes-bien aimés, il y aura résurrection, et elle doit être semblable à celle du Christ. Au Christ, les prémices : il est le premier né d’entre les morts.

       Celui qui aime son âme, la perdra ; celui qui hait son âme en ce monde la gardera pour la vie éternelle : ce langage ressemble à une énigme. Il n’en est rien pourtant et nous y trouvons la plus parfaite philosophie. Comment donc se fait-il que celui qui aime son âme la perdra ? Il s’agit de celui qui se laisse entraîner par des convoitises coupables, celui qui accorde à son âme plus qu’il ne doit. De là cet avis d’un sage : Ne marchez pas sous l’inspiration des désirs de votre âme. Et qu’est-ce à dire : Celui qui hait son âme ? C’est celui qui ne lui cède pas quand elle exige une obéissance qui ne lui est pas due. De même, en effet, que nous ne pouvons souffrir ni d’entendre, ni de voir les personnes pour lesquelles nous avons de la haine, de même faudrait-il témoigner une aversion  la plus vive à notre âme, toutes les fois qu’elle nous engagerait dans une voie contraire à la volonté du Seigneur.