Jean 1, 35-42

le disciple discret mais efficace

Cardinal John-Henry Newman

Sermons paroissiaux, tome 2 : L’année chrétienne, p. 16s

        Saint André, déjà disciple de Jean-Baptiste, servait son maître avec un autre disciple lorsque Jésus passa. Le Baptiste qui, dès le début, avait déclaré que sa propre place n’était que subalterne dans le dessein providentiel en train de naître, saisit l’occasion pour désigner à ses deux disciples Celui qui en serait le centre. Il dit : Voici l’Agneau de Dieu, c’est lui que j’ai annoncé, que le Père a choisi et a envoyé, lui l’Agneau véritable du sacrifice, dont les souffrances expieront les péchés du monde. En entendant ces paroles, les deux disciples, André était l’un d’eux, laissèrent aussitôt Jean, et se mirent à suivre le Christ. Celui-ci se retourna et leur demanda : Que cherchez-vous ? Ils répondirent qu’ils désiraient être autorisés à suivre son  enseignement ; il leur permit de l’accompagner chez lui et de passer la journée auprès de lui. Ce qu’il leur dit ne nous a pas été rapporté, mais saint André reçut la confirmation de la vérité des paroles du Baptiste, et c’est pourquoi il alla chercher son frère Simon pour lui faire part de sa découverte.

       Saint Jean l’Evangéliste, qui reçut l’inspiration de préserver de l’oubli certains traits concernant l’un ou l’autre apôtre, traits qui ne sont pas consignés dans les évangiles synoptiques, parle d’André dans deux autres passages où l’on voit bien que, bien qu’il soit aujourd’hui peu connu, il était en réalité très bien placé dans la faveur et la confiance de son Seigneur. Dans son douzième chapitre, saint Jean décrit André amenant au Christ certains Grecs qui étaient montés à Jérusalem pour adorer, et qui désiraient le voir. Il est remarquable que ces étrangers se soient d’abord adressés à saint Philippe qui, bien qu’apôtre, ne prit pas sur lui de les introduire à son maître, mais eut recours à son compatriote saint André, comme si celui-ci était, étant donné son âge ou son intimité avec le Christ, un meilleur truchement que lui-même : Philippe va le dire à André, et André et Philippe le dire à Jésus.

       Saint André fut le premier converti parmi les apôtres, il était spécialement dans la confidence de notre Seigneur, trois fois il nous est montré dans les évangiles présentant à Jésus de nouveau venus. S’il est peu connu historiquement, alors que son frère Pierre l’est bien davantage, nous pouvons dire que les hommes qui font le plus de bruit dans le monde ne sont pas nécessairement les plus favorisés de Dieu ; sachons tourner nos regards vers les vies discrètes en apparence et guetter autour de nous les vrais signes de la présence de Dieu, les grâces surnaturelles manifestées par la sainteté de certains élus, lesquels si faibles qu’ils paraissent sont puissants grâce à Dieu.