Ephésiens 4, 1-16

Matthieu, le publicain

Père Claude Flipo

Hommes et femmes du Nouveau Testament, p. 53s

          La Caravage, peintre italien du XVIIème siècle, a magistralement fait le portrait de Matthieu, le publicain, fils d’Alphée, saisi sur le vif au moment où il est appelé par Jésus. Ce chef d’œuvre se trouve dans l’église Saint-Louis-des-Français, à Rome. Le tableau, réalisé en 1600, mesure 340 centimètres sur 322. Le Caravage a représenté l’événement de la vocation de Matthieu comme la rencontre intense et silencieuse de deux regards. Lévi, tel est son nom avant qu’il ne devienne l’apôtre Matthieu, est assis à son bureau de douane, entouré de quatre auxiliaires occupés à compter la recette du jour. Son visage, vivement éclairé, est levé vers celui de Jésus, debout dans l’encadrement lumineux de la porte. Leurs yeux se croisent. Le Christ est entré, avec Simon-Pierre dans l’ombre, et d’un mouvement de la main droite, puissant et décisif, il appelle Lévi. Celui-ci, ébloui par la lumière soudaine et comme stupéfait, amorce un geste de recul et, de sa main gauche retournée vers sa poitrine, semble dire : Moi ?, alors que sa main droite agrippe encore la pièce de monnaie qu’il vient de compter. Le doigt de Jésus, dont la majesté traverse en quelque sorte l’espace du tableau, évoque irrésistiblement le doigt de Dieu appelant l’homme à l’existence, dans La Création d’Adam de Michel-Ange, à la chapelle Sixtine. Et le doigt de Pierre, sous le sien, semble acquiescer à l’appel du Christ et adopter Lévi comme compagnon.

Tout le mystère de la vocation divine s’exprime en cet instant décisif, que le récit évangélique narre en quelques mots rapides : En passant, il vit Lévi, le fils d’Alphée, assis au bureau de la douane, et lui dit : Suis-moi. Et se levant, il le suivit. Evidence de l’appel, chez un homme qui semble à mille lieux de s’y attendre, lui, le publicain, le fonctionnaire d’Hérode Antipas, réputé faire un métier de « pécheur public ».