Genèse 27, 1-29

La supériorité de Jacob sur son frère

Saint Ambroise de Milan

Jacob et la vie heureuse, SC 534, p. 419s

 

Celui qui mettait en avant l’oracle de Dieu l’a emporté : la rapidité l’a emporté sur la lenteur, la bonté sur la dureté. Pendant qu’Esaü cherchait en une chasse sauvage sa proie dans la campagne, Jacob a servi à son père qui l’aimait la nourriture de ses mœurs pleines de douceur, une grâce acquise acquise à la maison, les mets délicieux de sa tendre bonté et de sa piété filiale. Un don spontané touche notre cœur plus qu’un présent recherché qu’on nous offre par devoir. Jacob s’approcha des brebis et apporta au patriarche les petits de l’innocence ou plutôt les dons d’une sainte prophétie, car il a cru qu’aucune nourriture ne lui serait plus délicieuse que le Christ, qui comme une brebis a été mené à l’abattoir et comme un agneau au sacrifice. Il jugeait que pour celui qui est notre père à tous ou pour le peuple dont il était la figure, c’était une nourriture utile que celle par qui s’opérerait la rémission des péchés.

Si Jacob reçut la robe de son frère, c’est que sa sagesse digne d’un vieillard lui méritait le premier rang. Si le cadet dépouilla l’aîné, c’est qu’il se distingua par l’éclatante dignité de la foi. Cette robe, Rébecca la présenta à celui qui était la figure de l’Eglise ; elle donna à son cadet la robe de l’Ancien Testament, la robe prophétique et sacerdotale, la glorieuse robe royale de David, la robe des rois Salomon, Ezéchias et Josias, et elle la donna ainsi au peuple chrétien qui saurait faire bon usage du vêtement reçu, puisque le peuple juif le possédait sans s’en servir et en ignorait les beautés propres. Cette robe gisait dans l’ombre, abandonnée et dédaignée, elle était dans l’obscurité des noires ténèbres de l’impiété, et, dans le cœur étroit de ce peuple, elle ne pouvait être déployée plus largement. Le peuple chrétien la revêtit et elle resplendit. Il la fit briller de l’éclat de sa foi et dans la lumière de ses pieuses actions. Isaac reconnut l’odeur familière de sa race, il reconnut la robe de l’ancienne écriture, mais il ne reconnut pas la voix de l’ancien peuple, et ainsi il comprit qu’elle était changée. En effet, aujourd’hui encore cette robe est restée la même, mais elle est devenue la confession de foi harmonieuse d’un peuple plus dévot, et c’est à bon droit qu’Isaac a dit : La voix est bien la voix de Jacob. On peut comprendre par là que nous ne sommes pas justifiés par les œuvres mais par la foi : l’éclat de la foi couvre de son ombre les erreurs de nos actes et nous mérite ainsi le pardon de nos fautes.