Matthieu 2, 1-12

Le retour des mages

Saint Grégoire le Grand

Homélie 10 sur l’Evangile, SC 485, tome II, p. 255s

 

Les mages, retournant dans leur pays par un autre chemin, font entendre quelque chose d’important. En faisant ce qui leur est indiqué, ils nous suggèrent assurément ce que nous avons à faire. Notre pays, c’est le paradis, où il nous est défendu, une fois que nous connaissons Jésus, de revenir par le chemin pris à l’aller. Nous avons quitté notre pays par l’orgueil, la désobéissance, la recherche des biens visibles, la jouissance de la nourriture défendue. Il nous faut y retourner par les larmes, l’obéissance, le mépris des biens visibles, le frein aux désirs de la chair. Nous revenons donc vers notre pays par un autre chemin, car après avoir quitté la joie du paradis par les plaisirs, nous y sommes rappelés par les gémissements. Il faut donc, frères très chers, que, toujours tremblants, toujours sur nos gardes, nous placions devant les yeux de notre cœur, d’une part nos actions coupables, d’autre part un jugement d’une extrême rigueur. Méditons sur cette rigueur avec laquelle viendra un juge qui menace de son jugement et qui reste invisible. Il inspire des craintes aux pécheurs et cependant patiente, différant de hâter sa venue afin d’en trouver moins à condamner. Expions donc nos fautes par nos pleurs, avec la voix du psalmiste allons au-devant de sa face en confessant. Ne nous laissons pas surprendre pas quelque ruse de la volupté, ni séduire par quelque vaine joie. Tout proche est en effet le juge qui a dit : Malheur à vous qui riez maintenant, car vous connaîtrez le deuil et les larmes. Redoutons donc les ordres de Dieu si nous célébrons sincèrement la solennité de Dieu. C’est un sacrifice agréable à Dieu que la douleur pour le péché, comme l’atteste le psalmiste : Sacrifice pour Dieu qu’un cœur brisé. Nos péchés passés ont été remis à notre baptême ; nous en avons commis beaucoup après notre baptême, et nous ne pouvons être lavés une seconde fois par l’eau du baptême. Puisque nous avons souillé notre vie depuis notre baptême, regagnons notre pays : séduits par des plaisirs, nous l’avions quitté ; par l’amertume de la douleur, revenons-y.